Δευτέρα 2 Δεκεμβρίου 2024

Débrayage de Rémi De Vos, traduction d’Ersi Vassilikioti, mise en scène de Vassilis Triantafyllou


Les écrivains veulent souvent faire tenir l’immensité du monde sur une feuille de papier en adoptant un langage poignant, accusateur, souvent tonitruant et sans complaisance. Écrite dans un élan de jeunesse, avec des mots martelés: cris de rage, indignation et désespoir, la première pièce (1994) du dramaturge, au titre caractéristique, incite clairement le lecteur, auditeur ou spectateur à réagir, à lever le poing de la résistance et à donner le signal d’une rébellion dont la matière première est son Golgotha personnel au quotidien.

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Rémi de Vos montre l’hésitation du citoyen craintif et soumis. Comment faire grève? Comment s’opposer à l’injustice et comment enfin  se révolter, quand on a des enfants, des dettes et obligations ? Dans les treize instantanés numérotés de cet auteur français (peu importe l’ordre où ils sont joués), défilent les personnages familiers qui habitent le monde moderne et qui revendiquent une place au soleil, avec une vraie vie plutôt qu’une survie.
C’est un essai théâtral sur le rôle du pouvoir dans les relations humaines, au lit, au bureau, dans la rue… Avec scepticisme et amertume sur le «triomphe de la vulgarité de l’argent, de la mode, des faux-semblants, du glamour, de la laideur, de la pornographie…»

Rémi de Vos ne mâche pas ses mots et parle clairement des inégalités sociales, du chômage, de la concurrence déloyale imposant flatterie, délation, horaires inhumains et conditions de travail épuisantes. Dans un système capitaliste impitoyable, tout se mesure en termes de profit. « C’est simple comme une équation : plus d’argent, plus de vie. Dis-moi combien tu gagnes, je te dirai combien tu es.»
Vassilis Triantafyllou met bien en valeur le riche discours sémantique de Rémi de Vos, en alternant adresse au spectateur et utilisation du « quatrième mur »… Il arrive à créer ainsi une relation dialectique entre auteur et public. La mise en scène a un bon rythme et il passe sans effort, d’un moment à l’autre, et invente un langage audiovisuel avec des images signifiantes comme la lutte érotique de corps asexués,  et des sons. L’inclusion des paroles:  « Tais-toi, ne parle pas » de l’écrivain et dramaturge  turc Aziz Nesin (1915-1995) est, à un moment-clé de la représentation, tout à  fait pertinente.
La tempête d’images-un mur vidéo 3 D de Michalis Pastras-complète de manière critique l’aspect invisible des significations, en soulignant les rythmes étouffants des grandes villes modernes où le temps est de l’argent. La musique de Nikolas Gale est en relation étroite avec les lumières de Yorgos Ayannitis: elles se concentrent sur l’événement attendu et surtout sur sa subversion, pour agir comme catalyseurs d’émotion et forces motrices du tourbillon de l’esprit. Alexandros Davilas, Alexandros Theodoropoulos, Evangelia Kalogianni, Emmanouela Karytinou, Niki Koutelieri, Maria Bati et Vassilis Triantafyllou se partagent les personnages avec une véritable unité de jeu et un  bel esprit d’équipe.
 
Nektarios-Georgios Konstantinidis
 
Théâtre Noūs-Creative Space, 34 rue Troias, Athènes.  T. : 0030 2108237333.