Δευτέρα 20 Ιουλίου 2020

En attendant Godot de Samuel Beckett, mise en scène de Yannis Kakleas

Cette  pièce devenue culte écrite en 1948 fut publiée en 52 aux éditions de Minuit et créée l’année suivante au Théâtre de Babylone dans une mise en scène de Roger Blin qui jouait  Pozzo, avec Pierre Latour, Lucien Raimbourg, Jean Martin, Serge Lecointe  et Louki dans le rôle de Lucky. Le grand auteur refusait les conventions et cherchait à déconstruire les règles de  l’illusion théâtrale… Quatre personnages seulement;  deux attendent un hypothétique et non identifié un certain Godot qui ne viendra jamais…
Pas d’intrigue mais des jeux verbaux et scéniques. Sur le plateau, une route de campagne avec un arbre. Deux clochards, Estragon et Vladimir, répètent en continue des séries de gestes et se livrent à des joutes verbales sans issue. La façon de retirer une chaussure ou un chapeau, de faire des calculs de probabilité sur les trois crucifiés et les quatre Evangélistes ou de prendre la meilleure pose pour manger une carotte.
Quand le jeu s’épuise, Beckett rappelle la loi qui régit sa construction : attendre Godot est un principe régulateur et  sans signification dramatique. Il y a un autre couple : Pozzo et Lucky, une parodie du maître et de l’esclave. Pozzo tient Lucky par une longue corde et manie le fouet : il feint de déclamer une tirade devant le public, ajoutant ainsi un effet méta-théâtral de plus. Et survient alors le monologue devenu célèbre de Lucky, une sorte de raisonnement logique perverti, avec allusions burlesques, mais aussi composition sérielle à partir de cellules langagières.
 La mécanique verbale s’emballe et les compères s’emparent du chapeau de Lucky pour interrompre sa logorrhée. Chez eux, pas de psychologie ni d’autonomie de pensée : c’est leur couvre-chef qui les anime. Un jeune garçon vient alors, comme pour feindre une délégation de Godot. Au deuxième acte, pas plus d’histoire mais plutôt une une répétition déviée du premier. Des feuilles sur l’arbre mort marquent l’artifice théâtral et les personnages se mettent de nouveau à arpenter la scène. La déconstruction des styles se poursuit avec des tentatives poétiques, séries de mots, essais de tons… Samuel Beckett travaille sur les éléments scéniques et vide leur présence de tout référent. Le temps devient une durée intrinsèque puis arrive l’expiration des gestes et des voix…
 Ses personnages chutent mais pas de façon définitive : Pozzo est devenu aveugle et Lucky muet. Les micro-événements se répètent sans qu’une mémoire s’impose car cette répétition n’a installé aucune ressemblance et les personnages doutent de ce qu’ils ont vu et fait au premier acte. Vladimir et Estragon refont les gestes, redisent les mots jusqu’à épuiser leur répertoire et l’interrompre à la fin de la pièce. 
Yannis Kakleas souligne le burlesque et le caractère incongru et chaotique de cette farce clownesque. Incompréhension et quiproquos donnent à la pièce une tonalité comique et un pathétique de la dérision. Le metteur en scène a mis l’accent sur la vanité de l’existence humaine, sur le temps qui passe et la solitude dans la société contemporaine. Avec un décor fidèle aux didascalies de l’écrivain. Un seul ajout : une vieille bagnole, objet métonymique et référence à l’attachement de l’homme à la machine…
Spyros Papadopoulos (Estragon) et Thanassis Papageorgiou (Vladimir) forment un duo d’acteurs qui oscille entre comique et tragique, tout en essayant de surmonter leur naufrage dans l’inaction par leur entêtement à se parler ou à se jouer la comédie  avec quelques gestes cruels. Il faut signaler le jeu exceptionnel avec une belle gestualité d’Aris Servetalis dans le rôle de ce Pozzo qui a réellement besoin de Lucky pour exister dans un rapport dominant dominé. Lucky semble exécuter  les ordres! Et Orfeas Avgoustidis montre de façon remarquable un être déshumanisé qui dit toute la misère existentielle.
Aris Kakleas interprète d’une voix neutre, le jeune garçon, personnage énigmatique, messager de Godot et catalyseur du désespoir d’Estragon. La présence muette mais dansante d’Aggeliki Trobouki renforce le mystère et le caractère abracadabrant de Godot  que l’on continuera à attendre à jamais… 
Nektarios-Georgios Konstantinidis

Spectacle en tournée en Grèce, une production de ΤΕΧΝΗΧΩΡΟΣ

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