La pièce de Lena Kitsopoulou,
intitulée Karaflobekatsos et Spyridoula,
appartient à un répertoire qui propose l’insolite à la place peut-être de
l’esthétique du méta-moderne. Cependant, l’insolite de l’écrivaine grecque
projette plutôt le grotesque bourré d’éléments d’un méta-langage centré sur les
stéréotypes ainsi que sur certains clichés caractéristiques. Il se crée donc
une espèce d’expression linguistique à l’intérieur de la langue utilisée par
l’entourage dénonciateur. Il s’agit, l’on dirait, d’une mise en pages d’un
phénomène langagier proche de ce que l’on appelle le « théâtre dans le
théâtre ». L’élément expressif accompagne un acte corporel à côté de la
thématique associée au faire et au dire. Il est bien entendu que le mot énoncé
provoque l’explosion de la manière de présenter l’esthétique des extrémités.
Dans le texte de Lena
Kitsopoulou, les clichés provocateurs font légion, ce qui constitue un texte
qui se veut d’un côté provocateur et d’un autre dénonciateur visant la classe
médiocre des petits bourgeois. Ainsi, la provocation et la dénonciation s’affilient
dans le but de montrer au public les modalités qui aident à formuler, le mieux
possible, la partie prise de l’auteure. En effet, Lena Kitsopoulou projette ses
accusations à l’égard de l’ordre établi et prend le spectateur en témoin pour
exorciser avec aisance les forces maléfiques des bienséances au détriment, bien
entendu, de la vraisemblance dont on n’a pas besoin paraît-il. On peut très
bien vivre sans les contraintes de toute sorte, dans un climat donc d’euphorie
après avoir tourné en ridicule les façons de faire et de dire des gens autour
de nous.
Cependant, présenter sur la
scène, à travers le corps du comédien, la trivialité des choses dans une
société donnée qui, en plus, a besoin d’être guérie de ses multiples maladies,
semble, à vrai dire, à l’effort de Dieu qui aurait le pouvoir de purifier les
maudits. Or, Lena Kitsopoulou n’a pratiquement rien à faire même lorsqu’elle se
met en quatre pour choquer le public et l’inviter ainsi à voir la vérité
vulgaire de face. Pourtant, depuis que la civilisation existe, le théâtre se
donne la peine de corriger les mœurs et cela sans toujours hurler son désespoir
car rien ne bouge. Ce que Kitsopoulou entreprend de faire devient de plus en
plus incapable d’assurer le pouvoir énorme du théâtre, qui perd ainsi de sa
force vitale. Le spectateur aboutit à perdre de vue l’objectif de ce théâtre de
grandes et de trop nombreuses thématiques « masquées » par la
grossièreté du langage. L’esprit soi-disant provocateur n’est en fait qu’une
fourberie cachée sous les apparences d’un vouloir changer le monde et l’humanité.
Dans la représentation de la
pièce Karaflobekatsos et Spyridoula au
Théâtre « Stathmos », les comédiens suivent avec exactitude les
paramètres de leurs rôles, conformes à une conception de mise en scène du
vulgaire. La représentation se produit sur deux volets, le premier occupé par
l’Homme (Karaflobekatsos) et le second par la Femme (Spyridoula). L’Homme,
interprété par Konstantinos Avarikiotis, ne fait que parler à soi-même et
notamment à ses couilles, pauvre type ! Il a tant de choses à raconter à
sa partie génitale qu’à la fin, il succombe aux puissances maléfiques de son
corps « mal foutu » et des particularités de son cul. Sinon,
Konstantinos Avarikiotis joue avec de la bonne humeur et fournit à son
personnage une petite dose de vérité obsessionnelle qui le rend sympathique.
D’ailleurs, Hélène Stergiou,
dans la deuxième partie de la pièce, incarne une espèce de femme fatale,
habillée de façon appropriée, une femme qui ne fait que parler aussi et étaler
les menus détails de sa vie comme « femme » qui cache sa vraie
nature. Oui, l’homme caché sous la corporalité d’ensemble de Spyridoula, débite
des mots « choquants », des soi-disant inconnus du public considéré
apparemment comme un amas d’imbéciles, surtout dans un théâtre à Athènes, une
ville qui pilule de petits et de grands théâtres qui pratiquent l’avant-garde.
Aussi, la mise en scène de
Konstantinos Markellos tombe-t-elle dans le piège tendu par le texte et n’a pas
beaucoup de choix de montrer l’élément désaxé en relation avec son homologue,
polyvalent et sincère. Toutefois, l’ambiance créée par la scénographie de
Giorgos Vafias ainsi que les éclairages de Melina Mascha et la musique de
Giorgos Kassavetis permettent d’entrevoir une petite « lumière »
proche d’une coexistence de « vérité » fictionnelle et de fiction
basée sur le soi-disant. Il est à souligner que le décor a, en tant qu’éléments
séparés, sa propre place qui reflète les désirs et les passions tout
internes : la présence des colonnes – boîtes montre de prime abord un
univers uniforme. Au fur et à mesure que l’action avance, les colonnes
dévoilent leur contenu, c’est-à-dire des objets personnels et de petites
localités caractéristiques. Le passage de la métonymie à la métaphore se fait
sans brusquer l’entourage sur la scène et cela amplifie la portée de la
dynamique du spectacle.
Nektarios-Georgios Konstantinidis
Théâtre « Stathmos », 55 rue Victor Hugo, Athènes, tél. 0030 211
40 36 322
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