Dans un deux-pièces à Saint-Louis, Amanda Wingfield, une femme abandonnée par son mari, vit dans le monde fantasque de ses anciens amoureux, entourée par ses grands enfants: Tom, qui rêve de quitter son travail dans une usine de chaussures mais aussi l’étouffant cocon familial. Et la jeune Laura, à la timidité maladive et que tourmente une jambe infirme. Elle prend le plus grand soin de sa ménagerie de verre, de fragiles animaux miniatures. Amanda a demandé à Tom d’inviter un de ses copains employé comme lui dans la même usine, Jim O’ Connor… Et elle y voit un amoureux possible pour Laura.
De nombreuses similitudes existent entre la famille Wingfield et celle de Tennessee Williams. La Ménagerie de verre, écrite en 1944, est contemporaine de la fondation de l’Actor’s Studio. Comme toute son œuvre, la pièce est liée aux pratiques d’acteur de cette école où la construction du personnage est essentielle. Tout dans le texte est décrit avec précision: environnement, âge, milieu social, métier et habitudes des protagonistes… Pour une juste analyse du comportement humain et Tennessee Williams commente la situation par le biais du narrateur, ou grâce à des projections d’images.
Il y a dans cette pièce écrite avec le décalage qu’autorise la mémoire, des didascalies précises: elle « se passe dans la mémoire et n’est donc pas réaliste. La mémoire se permet beaucoup de licences poétiques. Elle omet certains détails; d’autres sont exagérés, selon la valeur émotionnelle des souvenirs, car la mémoire a essentiellement son siège dans le cœur. »
La Ménagerie de verre dépasse son époque: complexe et polysémique, elle peut, après plus de soixante-quinze ans, être encore réinventée et Georges Nanouris a créé un spectacle avec un rythme et des couleurs qui lui permettent de capter le quotidien avec justesse et réalisme. Seuls, les objets indispensables à la compréhension d’une scène sont ici gardés. Des lampes montent et descendent comme des pendules, soulignant le symbolisme de la ménagerie de verre de Laura et renforçant la poésie du texte.
Anna Massha (Amanda) a une voix monotone, des gestes répétitifs et une certaine hystérie qui affaiblissent le personnage… Lena Papaligoura montre bien le passage impossible de l’enfance à la féminité chez Laura, ses traumatismes psychiques et son caractère introverti mais elle n’évite pas toujours un ton mélodramatique facile pour créer l’émotion. Konstantinos Bibis criaille souvent et joue Tom de façon superficielle. Mais Anastassis Roilos, lui, excelle en Jim O’Connor et séduit par une belle présence scénique. Notamment, à la fin quand le jeune homme et Laura se livrent à des confidences et s’embrassent (on voit le baiser en ombre à cause des limites imposées par la crise du covid!). Mais c’est la seule scène poétique et touchante du spectacle…
Nektarios-Georgios Konstantinidis
Spectacle vu le 23 janvier, en retransmission depuis le Théâtre National d’Athènes.
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