Ce faux soliloque entrecoupé de silences fut écrit à Chablis en décembre 1927, lors du séjour que Jean Cocteau y fit avec son ami Jean Desbordes. Deux souvenirs l’auraient inspiré. Enfant, le monologue de l’acteur Mounet-Sully dans La Grève des forgerons de François Coppée l’avait émerveillé. Et il aurait surpris la communication, fréquemment interrompue, d’un couple ami qui était au bord de la rupture.
L’auteur lut ce « prétexte pour une actrice » destiné à Ludmilla Pitoëff en mars 1929 à la Comédie-Française qui en confia le rôle à Berthe Bovy. Il fut créé en 1930 et et c’était sa première collaboration avec Christian Bérard qui imagina un décor dépouillé à l’extrême.. «C’est obscène. C’est à Jean Desbordes que vous parlez », dit Paul Eluard qui fit un scandale: Jean Cocteau n’en fut pas mécontent car il était loin de nuire à la pièce dont le succès ne s’est jamais démenti en France comme à l’étranger. L’œuvre du poète la plus souvent représentée exige un investissement modeste! Et ce savoir-faire idéal pour une actrice, marqua un tournant dans la carrière du dramaturge qui ne s’interdira plus désormais le concours de monstres sacrés.
Cette Voix humaine a une évidente parenté avec les thèmes interprétés par des chanteuses populaires avec lesquelles Jean Cocteau travaillera aussi.
Louise Conte reprit le rôle en 1952 à la Comédie-Française puis Gaby Morlay et Simone Signoret. Et Anna Magnani dans Amore, un film réalisé en 48 par Roberto Rossellini. La Voix humaine inspira aussi un opéra à Francis Poulenc qui sera créé en 59 avec Denise Duval à l’Opéra de Paris et la pièce fut ensuite souvent mis en scène par Antoine Vitez en 1982 avec la soprano Anne Béranger. En Grèce, ce fut l’un des plus grands succès théâtraux d’Elli Lambeti en 1978. La pièce avait été jouée avec deux autres en un acte du même auteur, Le Menteur et Je l’ai perdue où la grande comédienne a donné la meilleure interprétation de sa vie !
Ici, Loukia Mihalopoulou sans jamais aller vers le mélo nous enchante aussitôt et excelle dans le personnage dont elle montre bien les éclairs d’angoisse mais aussi la fierté et le désespoir. Et dans la mise en scène pertinente de Nikorestis Haniotakis, chaque minute vécue au téléphone par cette amoureuse trahie, est une lutte constante d’abnégation et d’affirmation. Le décor d’Areti Moustaka : une chambre pleine de miroirs avec un grand lit, et au sol, des lettres et papiers déchirés, mais aussi la musique de Yannis Mathé et les lumières de Christina Thanassoula participent à ce bon spectacle.
Nektarios-Georgios Konstantinidis
Théâtre Mikro Chorn, 10 rue Amerikis, Athènes, T. : 00302111826479.
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