Σάββατο 28 Οκτωβρίου 2017

« 887 » de Robert Lepage

Robert Lepage est un homme du théâtre et du cinéma contemporain qui concentre en lui les fonctions d’animateur, de metteur en scène, de dramaturge et de comédien. L’on peut dire que Lepage se produit sur le plateau comme une machine spectaculaire dans le sens d’un créateur qui transforme le mot en image significative. En effet, l’artiste canadien « promulgue » ses propres lois de la scène, à commencer par la fonction de haute surveillance concernant le spectacle qui l’offre à son public. Robert Lepage s’avère un travailleur infatigable du théâtre qu’il connaît à fond ainsi qu’on a pu voir dans son dernier spectacle, au titre énigmatique « 887 », à Athènes. La scénographie grandiose se matérialise grâce à une maquette – installation qui donne au spectateur la possibilité de voir l’intérieur d’une maison. Toutefois, le décor concentre et combine les objets et les localités qui sont enrichis par les projections de vidéo. Ainsi, le langage du théâtre rencontre le langage filmique. Il est à noter que dans son solo multimédia performance, Lepage se présente comme un animateur qui s’engage à exécuter devant le public une partition particulièrement intéressante : Il se place dans une position d’un homme qui nous livre des détails de sa vie. De cette façon, l’artiste québécois pratique sur scène l’ « autofiction », selon ses propres mots. Par ailleurs, il exploite avec une extrême douceur les moments des expériences d’enfant tout en traversant les âges de sa vie jusqu’à présent. A l’aide de l’esthétique de la minuscule, Lepage se construit une ambiance faite de petites images censées présenter les macrostructures de son univers à lui. Les souvenirs de l’enfance, de l’adolescence, de l’âge adulte s’étalent généreusement comme des confessions sincères face au public. Le comédien part depuis une image minime et offre au public un grand spectacle dans lequel défilent des fastes inattendus, même si le discours est toujours attaché à l’esthétique de la parole simple et quotidienne. Ici, l’appui technologique y est pour quelque chose et surtout quand il faut que l’élément personnel rejoigne le cadre sociohistorique du pays de Lepage. Durant deux heures, la scène est occupée par un seul interlocuteur qui dévoile ses propres impressions, ses sentiments et ses souvenirs hantés par des moments de plaisir et des moments de détresse. En fin de compte, le monologue de Robert Lepage assure le passage de la réalité à la fiction imbue d’une autocritique pourvue d’éléments narcissistes. De même, l’artiste, dans un espace hors – scène, nous emmène à valoriser des moments de sa vie privée et sa décision de devenir comédien. Une confession de profundis ? Oui et non, cela dépend de point de vue de chacun.

Nektarios – Georgios Konstantinidis

Spectacle en français sous-titré en grec, Centre Culturel Onassis, 107 Sygrou Avenue, 24 – 27 Octobre 2017, 20 h 30


Πέμπτη 5 Οκτωβρίου 2017

Ça ira (1) Fin de Louis de Joël Pommerat

   
      
     La pièce de Joël Pommerat, Ça ira (1) Fin de Louis (2015), est écrite dans le but, pensons-nous, de présenter certains détails dans les préparatifs de la Révolution française. En effet, toute la substance intellectuelle est cueillie dans le « discours » dominant de cette pièce frôlant le politique. Les faits qui jalonnent les étapes historiques de la pièce sont apocalyptiques, l’on dirait, de l’esprit qui anime le passage de l’histoire à la fiction. A vrai dire, rien ne paraît mythologique ou fantasmatique, les faits sont là, sur la table d’un chirurgien intelligent et curieux à l’extrême, se prêtant de faire l’anatomie de tous les instantanés qui forgèrent la philosophie des droits de l’homme et du citoyen. La Révolution française est un fait assez lointain quant à son envergure de réalité ébranlante « ici et maintenant ». Pourtant, le génie de Pommerat, auteur et metteur en scène à la fois, « manipule » avec beaucoup d’attention le matériel sur lequel est bâtie cette nouvelle vision du monde proclamée par la Révolution. Aussi, le petit peuple, formé de gens de tous les jours et de tous les métiers, c’est-à-dire le Tiers Etat, est présenté dans la pièce sous ses traits de protagoniste de cette époque tourmentée et incertaine. La volonté du peuple, mal guidé ou bien guidé, ne cesse de produire de nouvelles circonstances qui accusent l’assimilation, en effet, de toutes les leçons procurées par le siècle des Lumières. Les consciences étaient prêtes à changer la réalité, de plus en plus offensive à l’égard de la petite gente, en réalité révolutionnaire. Le peuple concrétise les propos de la rhétorique intellectuelle en la reconnaissant dans son application à la vie quotidienne.

     Les grands jours décisifs dans l’Histoire de la France, les bases de la constitution et la réaction du pays contre la tyrannie des Versailles offrent la possibilité de « colorer » avec ardeur les dessous, c’est-à-dire les choses invisibles, qui fondent, après tout, l’apparat philosophique et idéologique des faits majeurs de la Révolution.  
     Joël Pommerat, et c’est le mérite d’un auteur – metteur en scène flexible, transforme le réel historique en réalité universelle. Sa procédure s’appuie semblablement sur la neutralisation des événements provenant de l’Histoire, au profit de l’ontologie. Les exigences de tout homme civilisé, à la conscience politique forgée, au sein de l’égalité et de la liberté, conduisent au besoin impérieux de réviser les conditions de coexistence. Est-ce qu’on peut vraiment de nos jours coexister avec son voisin et prendre en plus plaisir de cette cohabitation ?
     La pièce et la mise en scène de Pommerat avancent jusqu’aux profondeurs de la question posée. Cela concerne plus que jamais notre vie quotidienne dans le monde entier. La Révolution française s’avère, grâce à la mise en scène de Pommerat, le guide œcuménique hic et nunc. Le public athénien, hautement politisé et connaisseur de l’Histoire de l’époque de Louis XVI, admirateur de l’esprit français, remplit complètement un grand amphithéâtre et applaudit avec enthousiasme et émotion la troupe parisienne. D’ailleurs, ces excellents comédiens se produisirent sur scène de manière à donner l’impression qu’ils oscillent entra la réalité de l’ambiance grecque et l’appareil fictionnel de la « mimésis d’une action ».
     L’on dirait, enfin, que l’auteur se partage entre deux options : faire vrai ou être vrai ? Comme metteur en scène, Joël Pommerat essaye d’établir l’équilibre entre les deux. Le climat théâtral de sa pièce est conduit par le souci de l’esthétique qui lui laisse la liberté de dépasser l’élément moderne. De surcroît, la mise en scène permet de valoriser l’élément méta – moderne produit à propos. Ainsi, les tableaux vivants sur la scène représentent sciemment les critères qui bâtissent les situations théâtrales en relation étroite avec l’appareil mimétique des Assemblés du peuple français : les comédiens s’entremêlent aux spectateurs. En outre, le gros fatras, produit des effets sonores ainsi que la fumée des cigarettes sur le plateau et un peu partout dans la salle renforcent à l’aide de l’éclairage la théâtralité incontestable du spectacle.     

Nektarios – Georgios Konstantinidis


Spectacle en français sous-titré en grec, Centre Culturel Onassis, 107 Sygrou Avenue, 4 – 8 Octobre 2017, 19 h 30