Σάββατο 20 Απριλίου 2024

Le Roi Lear de William Shakespeare, traduction-adaptation de Stratis Paschalis, mise en scène de Stathis Livathinos


L’intrigue de cette tragédie rappelle celle d’un conte populaire, ou d’une parabole évangélique. Un vieux roi distribue richesse et pouvoir à ses filles Régane et Goneril, hypocrites et ingrates mais déshérite Cordelia la plus jeune, honnête et sincère. 
Lear,  tyrannique, vaniteux, égoïste et têtu  mais sûr de sa grandeur, de sa puissance  absolue et de son omniscience, croit  qu’il est presque un dieu et qu’il a le droit de manipuler à volonté, les gens et leurs émotions.

William Shakespeare écrit ici une allégorie sur l’arrogance du pouvoir et sur la folie humaine. La grande passion et le tourment de Lear sont le purgatoire d’un homme qui découvre les grandes vérités de la vie et du monde, après avoir gravi toute l’ascension de la souffrance, causée à la fois par sa propre folie et la barbarie sociale… à laquelle il a amplement contribué.

Stratis Paschalis a écrit une version moderne et condensée de la célèbre pièce en vingt-six scènes et en un seul lieu, sous une immense coupole étoilée. Les époux des filles de Lear, d’autres rôles mineurs et une partie de la rhétorique exubérante de l’original sont absents. Et Kent et le Fou réunis en une seul personnage. Mais rien ne trahit le style et l’esprit du discours poétique. 
Stathis Livathinos a gardé l’essence  de la pièce et met en scène un XXI ème siècle dominé par la technologie numérique et les écrans.  L’homme est captif d’une réalité virtuelle qui l’aliène de son prochain: une nouvelle forme de maladie… Et ce Lear qui n’a pas de trône, souffre, dans un service de soins intensifs en perpétuel mouvement.

©x

©x





















Hélène Manolopoulou a imaginé un environnement morbide et suffocant, avec nombreux écrans au centre de la scène où des câbles interminables délimitent et submergent l’espace. Les vidéos de Christos Dimas et les éclairages centraux d’Alekos Anastassiou capturent l’invisible et l’indicible du monde mental des personnages. Télémaque Moussas  crée un environnement sonore renforçant le mystère et un climat menaçant, tout en soulignant la contribution de la Nature, dans la confrontation de Lear avec le monde.

Betty Arvaniti, grande comédienne grecque, souligne de manière évolutive et approfondie la cruauté, l’autoritarisme, l’ arrogance, la folie et la dimension tragique de ce Lear qui marche vers sa perte. Nikos Alexiou joue  avec agilité et  précision Kent et le  Fou. Antonis Giannakos (Edgar) incarne avec souplesse, un désespoir confinant à la folie.

Nestoras Kopsidas (Gloucester) exprime sans détour l’expérience de la trahison, de la tromperie et de l’abus que subit ce personnage théâtral et exprime  la relation conflictuelle entre le bien et le mal et Gal Robissa, est impressionnant en aventureux Edmond, avec un mouvement éloquent et un cynisme exemplaires.

Erato Pissi (Cordélia), Eva Simatou (Régane) et Virginia Tabaropoulou (Goneril) sont, avec clarté et poésie, des figures symboliques  et elles agissent comme des vases communicants, mais aussi comme une loupe qui montrerait sous un jour encore plus repoussant, le visage de ce père tyrannique et abusif. Un spectacle à ne pas manquer !


Nektarios-Georgios Konstantinidis

Théâtre de la rue Kefallinias, 18 rue Kefallinias, Athènes, T. : 0030210 8838727.

 https://www.youtube.com/watch?v=aErWvcVbwVI



 

Τρίτη 26 Μαρτίου 2024

Du Sexe de la femme comme champ de bataille de Matéi Visniec, traduction de Natasha Sideri, mise en scène de Stelios Patsias

Peu après la guerre en Bosnie, l’auteur a écrit avec fougue en trente scènes, cet essai théâtral dense où il analyse en détail les pensées, arguments, conclusions  sur la complexité de la psyché avec une tendance à la méchanceté…

Le dramaturge roumain francophone, malgré ses accusations trouve finalement un exutoire dans un scepticisme optimiste qui apaise le traumatisme. Un enfant à naître est toujours innocent et suscite l’espoir de lendemains meilleurs sans calamités, ni sans ni larmes, bref, sans tous les malheurs dus à l’absence coexistence pacifique à l’échelle planétaire depuis l’origine du monde.

Comme l’indique clairement le titre, Du sexe de la femme comme champ de bataille, le thème principal est ici la violence de genre, ses perceptions stéréotypées et les conséquences dévastatrices qu’elle a sur la vie des gens, quelle que soit la situation spatio-temporelle. Les femmes sont totalement dévalorisées et doivent servir  aux objectifs de vengeance, ici révélés les instincts sombres et sexuels. Dans ce conflit civil, le viol de la femme par un ou plusieurs combattants, est une tactique militaire écœurante pour humilier moralement l’ennemi.

©x

©x

Les deux femmes ici expriment la solidarité contre la maltraitance, retraçant toutes les étapes de l’obscurité, à la lumière. Dorra a été violée et porte dans son ventre un enfant: son père est la guerre et sa mère, dans l’horreur. Au fil des séances avec la psychologue américaine Kate, confrontée elle aussi à ses propres blessures, elles prendront les décisions qui changeront leur vie.
Nous avons relu le texte en français et la traduction en grec de Natasha Sideri est solide. Stelios Patsias le met en scène avec ingéniosité, en soulignant l’esthétique du texte, partant du réalisme jusqu’au rêve-fantaisie, à un absurde à la limite du grotesque, voire du macabre.
L’espace scénique (décor et costumes de Maria Palanza) est simple : au centre du plateau, un lit d’hôpital et au sol, une ligne claire délimitant le lieu d’action: comme la mosaïque de l’institution thérapeutique ou les tranchées. Nicole Dimitrakopoulou (Dorra) et Sophia Palanza (Kate) incarnent avec une grande fluidité ces personnages. Elles nous donnent l’impression de mondes psychiques grand ouverts. Leur style de jeu à l’humour caustique, est adapté à une « philosophie du mais » où hypocrisie, racisme, intolérance, suspicion et  duplicité de chaque Balkan à l’égard de son voisin différent, sont mis à nu.

Les personnages lèvent de façon répétée un verre de vin et cela culmine  à la fin avec une chute abrupte du texte. L’alternance d’éclairage-clés de Nafsika Christodoulakou et la composition musicale de Giorgos Kassavetes créent une  menace rampante et une terreur, en renforçant le caractère invisible des mots et de certains événements.
Stelios Patsias met en scène un enfant à naître exigeant nourriture, caresses et affection de sa mère à travers son utérus, menaçant de crier s’il en est privé. Antonis Papadakis et Lefteris Katahanas, à moitié nus, avec un masque sinistre, créent une image puissante… Nous avons alors des sentiments mélangés de compassion pour le fœtus, et de malaise devant le monde misérable qui va être le sien… A ne pas manquer !

 Nektarios-Georgios Konstantinidis

Théâtre Choros, 6-8 rue Praviou, Athènes, T. : 0030 2103426736

https://www.youtube.com/watch?v=JIOxe5xLQ2I

Δευτέρα 11 Μαρτίου 2024

Araf de Yannis Tsiros, mise en scène de Yorgos Paloumpis

 


Une nuit, alors qu’ils préparent fébrilement sur une île la saison estivale, Elias Leoussis, propriétaire d’un hôtel insolite, le Aegean, et Fotis, son jardinier et associé, récupèrent dans leur bateau, sur une mer agitée, un chien sauvage de couleur sombre, effrayé. Avec Matina, la vétérinaire, ils doivent prendre les décisions urgentes concernant cet animal non invité sur l’île dont la présence pourrait entraîner toute une série d’ennuis…

La stérilisation et sa vie dans un refuge semblent être une solution facile et rapide mais les associations de défense des animaux s’y opposent. Après négociations et revirements mettant en évidence l’insécurité, les contradictions psychologiques des trois personnages, un compromis sauvera les apparences… sans effusion de sang.

©x

©x

Avec allusions et références lisibles, Yannis Tsiros complique habilement l’affaire en photographiant la question de l’immigration et en jetant le doute sur l’issue de cette affaire. Sa nouvelle pièce au titre mystérieux, se prête à de nombreuses lectures. Dans une langue allégorique, Yannis Tsiros peint notre attitude et notre coexistence problématique avec l’autre, l’étranger, le différent, le faible, le sans-défense, le vulnérable… Celui que nous craignons parce que nous ne pouvons pas et/ou ne voulons pas comprendre et accepter. Celui qui nous craint et qui « aboie » pour se défendre contre la suspicion, les préjugés, l’exploitation et l’injustice. Dans un langage allégorique, l’écrivain dit l’hypocrisie, l’indifférence, le cynisme et la spéculation mais surtout l’absence totale d’empathie. Depuis Le Menton mal rasé (2004), Olga invisible (2012) et un an plus tard Graine sauvage et Le Jour du Seigneur en 2022, (voir Le Théâtre du Blog) et maintenant avec Araf, le grand écrivain grec dénonce l’oppression de l’homme sous le poids de la société et la dépendance, résultat d’ un conformisme permanent.

Yorgos Paloumpis fait ressortir dans sa mise en scène, les impératifs du texte à un rythme qui accroît le suspense. Réalisme des décors et costumes de Natasha Papastergiou, éclairages de Vassilis Klotsototiras et composition musicale de Kostas Nikolopoulos soulignent la tension du texte.
Joseph Polyzoidis (Leoussis), Fotis Lazarou (Fotis) et Rania Schiza (Matina) interprètent avec une belle unité de jeu, ces personnages attachants. Ne manquez pas cette pièce qu’il faudrait absolument traduire en français et autres langues.

 Nektarios-Georgios Konstantinidis

 Théâtre Apothiki, 40 rue Sarri, Athènes, T. : 0030 210 3253153

 https://www.youtube.com/watch?v=19t2E17xL6U

Κυριακή 11 Φεβρουαρίου 2024

Alifeira (Αλίφειρα), texte et mise en scène d’Andreas Staïkos


Ce grand écrivain et traducteur (quatre-vingt ans) a étudié les lettres à l’université de Thessalonique et été auditeur libre au Conservatoire national d’art dramatique à Paris (classe d’Antoine Vitez). 
Il a écrit et mis en scène ses pièces, entre autres : Clytemnestre peut-être (1974), Karakoroum (1989), Plumes d’autruche (1994), Napoleontia (2007), Alceste ou les Beaux Rêves (2012), Hermione (2022) et Alifeira cette année. Son roman Les Liaisons culinaires a été traduit en de nombreuses langues. 
Sa dernière pièce Alifeira nous a fascinés. Faut-il quitter ce lieu, ou y rester pour toujours ? Certains souhaitent ardemment le quitter et d’autres viennent le découvrir, pleins d’espoir  après avoir lu les récits des ancêtres sur son passé glorieux? Trouveront-ils ce qu’ils cherchent ou s’agit-il de mensonges, illusions et pures déceptions ?

©x

©x

L’espace chez cet écrivain est  toujours l’occasion d’une aventure linguistique vers l’absurdité, la parodie et le déguisement. C’est un jeu de mots sans fin où émergent des personnages et situations au déroulement choisi par les acteurs en répétition. Créateurs avec l’écrivain et metteur en scène, ils façonnent le texte final, généralement quelques jours avant la première.
Ainsi est née Alifeira. Le grand dramaturge grec s’inspire de la vie de cette ancienne cité oubliée d’Arcadie mais on retrouve ici toutes ses références, obsessions et souvenirs. Le protagoniste est la Langue avec ses allusions, ambiguïtés, négations, présupposés; les dialogues se conjuguent ici avec d’autres textes et avec l’Histoire elle-même. Andreas Staïkos met en évidence la théâtralité, la création d’une autre illusion,  à la recherche de la vérité.

Lela et Papagalina vivent dans le village presque désert d’Alifeira mais ces jeunes femmes sont sur le point de partir. L’arrivée inattendue d’Epaminondas, un archéologue  et d’une excentrique Baronne bouleversera leurs plans. Ces personnages tourbillonnent jusqu’au vertige dans une danse de vérités et mensonges, secrets et tromperies. Et ils se confrontent à de nouvelles questions demeurant sans réponse.
Personne ne reste à Alifeira et personne ne la quitte. Des valises au centre de la scène, signifient l’arrivée et le départ et seront là jusqu’à la fin. Le nouveau se construira sur l’ancien et le présent sur le passé; il le remettra en question, voudra le détruire, mais à partir de ses fragments,  regardera vers l’avenir.
Alexis Kiritsopoulos a conçu un décor à caractère métonymique et les éclairages de Charis Dallas, la musique originale de Nikos Xydakis soulignent le goût doux amer de cette comédie. 

Eleni Zarafidou (Lela) et Emilia Miliou (Papagalina) incarnent ces femmes qui gardent les Thermopyles d’Alifeira, en soulignant l’humour caractéristique de l’auteur. 

Dimitris Passas excelle en Epaminondas et Emmanouela Kontogiorgou est une Baronne sensuelle et imprévisible… Perchée sur ses escarpins,  elle tire avec frénésie sur sa cigarette. 

Laissez-vous séduire par la magie d’Alifeira et riez sans crainte… Peut-être trouverez-vous dans ses ruines, un coin à vous, aussi familier qu’oublié… 

Un spectacle à ne pas manquer !

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Théâtre municipal, 32 avenue des héros de Polytechnique, Le Pirée (Grèce).  T. : 00302104143310

Τρίτη 30 Ιανουαρίου 2024

Le Mot progrès dans la bouche de ma mère sonnait terriblement faux de Mateï Visniec, traduction d’Ersi Vassilikioti, mise en scène de Catherine Papageorgiou


Avec cette œuvre clairement antimilitariste (2005), l’écrivain roumain francophone met l’accent sur les conséquences humanitaires et la culpabilité d’une «victime», symptôme de tout désastre qui s’abat sur l’homme. Des cadavres s’entassent dans une pièce où la solitude de soldats morts écrase celle des vivants qui ont perdu leur enfant, ignorant aussi la terre (la tombe) qui les recouvre.

La Mère, représentant toutes les mères, s’exclame  : «Dans ce pays, une mère heureuse, c' est une mère qui sait où sont enterrés ses enfants. Une mère heureuse est une mère qui peut s’occuper à volonté d’une tombe, et qui est sûre que, dans cette tombe-là, se trouve bien le corps de son fils et non pas un cadavre de fortune ». Ce cri de désespoir universel s’accompagne d’actions presque uniques dans leur symbolisme. Ici, les femmes enterrent leur fils dans des chariots-tombeaux mobiles…

Mateï Visniec économise l’action avec une trouvaille ingénieuse: parmi d’autres, celle du présent-absent. Le fils (Vibko), protagoniste mort, réapparaît comme une ombre désirable  qui parle mais sans  jamais vraiment parler, à ses parents. Le tragique, dans la même économie, est imprégné d’actions violentes touchant au grotesque, en soulageant le spectateur et en rendant aussi pathétique, l’univers du deuil. 

Catherine Papageorgiou illustre le texte avec imagination, en soulignant le scepticisme amer que dégage le personnage d’une vieille Folle: «Tous les os sont mélangés, maintenant, c’est comme ça. À quoi bon vouloir une tombe ? Toute la terre est une tombe. »

©x

©x

La metteuse en scène suit l’esthétique de l’auteur, fait évoluer les personnages dans un monde cauchemardesque entre réalisme et absurde, voire métaphysique.  Myrto Stampoulou a imaginé une scénographie où sont séparées clairement les actions, avec un objet caractéristique: une table boiteuse au centre du plateau est le signe de la destruction totale de la maison. Les costumes d’Irini Georgakila, la musique originale de Marina Chronopoulou et les éclairages de Kostis Mousikos contribuent à illustrer le deuil et l’identité des personnages.

Mania Papadimitriou, grande actrice grecque (la Mère) exprime avec une émotion contrôlée la profondeur et le poids du chagrin. Elle embellit aussi le rôle de la Patronne avec des éléments comiques: exubérance et extraversion. 

Dimitris Petropoulos évolue dans le même esprit, en exprimant intérieurement l’angoisse et le désespoir du Père mais il montre aussi le cynisme d’un impitoyable maquereau.
Tassos Lekkas incarne le Fils, traçant avec clarté la ligne de démarcation entre le monde des morts et celui des vivants. Il est également Caroline, un travesti intelligent qui condamne avec un esprit caustique toutes les idéologies qui ont mené l’Humanité vers des conflits sanglants et des impasses.

Alexandros Varthis interprète Stanko, le Milicien, le nouveau Voisin, le Soldat, avec le poids des mots et une expression fondée sur l’exagération. Dans le Nouveau Voisin en particulier, il exprime de façon para-linguistique mais poignante l’attitude impitoyable d’un homme n’ayant ni barrières ni inhibitions… et à l’intelligence et à l’empathie limitées…
Elisa Skolidi joue Ida, une fille effrayée et vulnérable, réduite à se prostituer, transmettant terreur et insécurité. La danse sensuelle sur une barre suspendue (chorégraphie de Chrysiis Liatziviri et pole danse, Mello Diannellaki) symbolise l’éclat trompeur d’un monde nocturne où rien n’est ce qu’il semble être... Elisa Skolidi excelle en Mirka, la vieille dame folle au visage mauvais et dans une transformation fulgurante, elle joue habilement des tons comiques ou dramatiques, toujours sur le fil du rasoir.

L’image finale de ce spectacle incontournable est le retour de la Fille, à la maison, optimiste malgré tout: «Et la maison n’est pas entièrement brûlée, on va s’en sortir.» Et quand Ida creuse la terre et y plante une fleur, un jeune homme, sans dire un mot, arrose cette fleur avec… du papier-monnaie: l’argent gouverne le monde et c’est l’ennemi… 

Mateï Visniec serait sans doute heureux de voir ce spectacle !

 Nektarios-Georgios Konstantinidis

 Théâtre Bellos, 1 rue Kekropos, Plaka, Acropole d’Athènes. T. : 00306948230899.

Σάββατο 6 Ιανουαρίου 2024

Cochons d’Inde de Sébastien Thiéry, traduction de Thomas Voulgaris, mise en scène d’Evi Dimitropoulou

 


La troisième pièce de l’écrivain français qui a obtenu deux Molières en 2009,  est créée en Grèce. Cette comédie dénonce un système financier intransigeant mais sans donner une leçon de morale et fait rire le public.

Vassilis Vlachos excelle en Alain Kraft, un bourgeois de cinquante-huit ans d’origine modeste. Il vient effectuer un retrait en espèces à sa banque mais la nouvelle direction indienne de l’établissement a bloqué son compte et refuse de le laisser partir. On l’accuse d’avoir enfreint la loi, en s’étant enrichi et ayant «changé de caste».

©x

©x

L’acteur incarne, entre sérieux et burlesque, toute une gamme des sentiments : surprise, confusion, angoisse, colère, indignation, compromis… de ce client, victime d’un système autoritaire qui va gérer sa fortune au nom de la justice sociale !
Chryssovalantis Kostopoulos interprète avec charme et mystère un guichetier solitaire qui dévoile progressivement le besoin d’être aimé et un comportement manipulateur.
Elissavet Stavridou (Brigitte) crée une personnage excentrique qui entre dans un délire amoureux pour Alain Kraft et fait généreusement rire. Andriani Toundopoulou est sublime dans les personnages  de La Dame, La Mère et L’Indien et elle fait ressortir tout le comique absurde de cet univers kafkaïen. Bref, Cochons d’Inde dans la mise en scène précise d’Evi Dimitropoulou est un bon spectacle !

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Théâtre Alexandria, 14 rue Spartis, Athènes, T. : 0030 2121007079.

Δευτέρα 30 Οκτωβρίου 2023

Sandra à la lumière d’Akis Dimou, mise en scène de Chryssa Kapsouli


Cet auteur grec de cinquante-neuf ans est l’un des plus joués dans le théâtre public ou privé. Diplômé de la Faculté de droit à Thessalonique où il habite aujourd’hui, il a écrit plus de cinquante pièces et nous avions assisté en 1994 à la première, ... et Juliette, un monologue.

Ici, devant un tribunal invisible, Sandra témoigne  de la mort d’un «ami». Tout au long de l’interrogatoire et témoignage, elle essaye de garder une distance par rapport à l’accident. Elle raconte les événements qui ont suivi sa rencontre avec un artiste gréco-canadien, Dani Thomasson, spécialisé dans les films de scènes violentes dans l’ensemble du règne animal. 

 

©x

©x

Un monologue en référence d’abord à un film où on suit les dernières heures d’un scarabée avant que la botte d’un homme ne l’écrase, puis à un autre film que Dani a réalisé à l’insu de Sandra sur ses ébats sexuels !  Son ami Tryphon, fabricant de meubles à Corinthe, découvre ce tournage secret et elle cherchera et finira par rencontrer Dani dans un hall d’exposition où il prépare un nouveau film,  cette fois avec des écureuils. Au cours de la conversation, elle le pousse avec force.  Il tombe alors contre une vitre et se blesse mortellement.
Le plus intéressant ici est le discours fragmenté de Sandra avec des réactions émotionnelles contradictoires quand elle décrit ces événements. Elle  semble observer et évaluer son image à distance, comme si elle était enregistrée par une caméra invisible: celle utilisée par Dani ou celle qui enregistre son interrogatoire. 

Le langage poétique et les images métaphoriques se combinent. Chryssa Kapsouli érige le personnage de Sandra en symbole de toutes les femmes maltraitées, violées et assassinées à cause de leur sexe. Un commentaire de vidéos projetées sur les féminicides en Grèce  souligne le caractère activiste de ce théâtre.
La metteuse en scène dénonce ici avec cet hommage-protestation d’Akis Dimou, l’attitude de la Justice envers les victimes et ajoute un bref récit: Marianne Bachmeier (1950-1996) est devenue célèbre en Allemagne après avoir en 1981, tué le meurtrier présumé de sa fille dans la salle du tribunal de Lübeck. Elle avait été condamnée à six ans de prison. 
Interprétation vibrante de Katerina Tsoligka qui EST Sandra et dont le corps-signe nous rappelle des vérités que nous nous préférons souvent ne pas affronter… 

Nektarios-Georgios Konstantinidis 

Théâtre Fournos, 168 rue Mavromichali, Athènes. T. : 0030 210 6460748.

https://www.youtube.com/watch?v=1LGGlvujKeQ