Κυριακή 30 Οκτωβρίου 2022

Le Message d’Argyris Chionis, par la compagnie APUS, mise en scène d’Anthi Founda


Cette pièce, que son auteur (1943-2011), a écrite en grec à Amsterdam en 1973, est inspirée d’une histoire de Franco Sacchetti, poète et romancier italien (1335-v. 1400) déjà curieusement proche… d’En attendant Godot de Samuel Beckett.

Argyris Chionis surtout connu pour sa poésie et ses récits, n’a écrit que trois pièces. Dans cette farce en quatre tableaux, deux messagers (A et B) qui n’ont pas aucune destination précise, sont chargés de transmettre un message très important à un Monsieur inconnu. Ils doivent parcourir une distance énorme mais elle nous avons l’impression qu’elle est dans leur moi profond. Même toujours en marche, ils restent souvent immobiles dans un coin et ont oublié ce message important. Mais, à travers une série de micro-actions, ils font des efforts pour s’en souvenir, tout en se livrant à un délire existentiel, métaphysique et aussi profondément politique. Le metteur en scène a limité l’action, ce qui renforce l’allégorie de ce Message.

Les acteurs transforment tout au long du spectacle les éléments de décor  pour figurer un chemin, à une maison, voire une sorte de prison. Et cela accentue le fait que ces personnages sont condamnés à un ressassement et à des rappels lancinants de leurs repères. Anthi Founda a ajouté au texte original des répliques où il commente l’actualité contemporaine, comme la présence de la Police à l’Université. Antoine Kyriakakis et Georges Paterakis forment un duo aux mêmes codes d’expression et leur jeu très corporel souligne la parole politique, toujours entre burlesque et «sérieux». 

 Nektarios-Georgios Konstantinidis

 Théâtre Choros, 6-8 rue Praviou, Athènes. T. : 0030 2107234567.

Πέμπτη 27 Οκτωβρίου 2022

Niki, ce soir à la party, adaptation de Party chez Élisabeth P de Niki Triantafillidi, réécriture et mise en scène de Roula Pateraki


Un spectacle en hommage à Niki Triantafillidi (1942- 2013), une femme exceptionnelle dans l’histoire de la culture grecque du XXème siècle. Comédienne de rare qualité, elle excellait au théâtre, au cinéma comme à la télé. Elle a interprété des nombreux rôles importants du répertoire et a créé parmi d’autres, le court-métrage, To synithismeno mou oneiro (1970) et a joué pour les grands cinéastes Pantelis Voulgaris et Théodoros Angelopoulos. Elle enseignait aussi le théâtre dans des écoles d’art dramatique et a obtenu le prix Marika Kotopouli. Elle a fondé son propre théâtre, a signé des traductions et écrit trois pièces.

Dans ce solo multimédia qui est aussi une performance, Victory of the Rose (Niki Triantafillidi) fait le bilan de sa vie intérieure et qui, à travers trois métamorphoses (Élisabeth, Maxime et Alice) et les personnages archétypes de la mère et du père, arrive aux tréfonds de son existence. Dans cette autofiction, l’auteure dévoile en chapitres sa personnalité, y compris son moi profond. Avraam Papavramopoulos crée ici un univers onirique avec projections d’images et tableaux qui renforce le trajet vers l’inconscient, le psychisme, l’esprit, les bons souvenirs et les refoulés de l’héroïne.
Une soirée se prépare selon un rituel établi où chaque objet a une valeur symbolique : table, verres, assiettes, petites statues simulant des invités. Bref tout un microcosme où qui montre par bribes les différentes facettes de la femme.
Nana Papadaki incarne tous ces personnages qu se livrent avec passion à un voyage vers l’âme. L’expression de son corps et son jeu énergique font de ce texte, un monologue presque métaphysique, celui d’une autre Alice au pays des merveilles…

 Nektarios-Georgios Konstantinidis

 Théâtre Fournos, 168 rue Mavromichali, Athènes. T. : 0030 210 6460748

Κυριακή 23 Οκτωβρίου 2022

Ημέρα Κυρίου (Le Jour du Seigneur) de Yannis Tsiros, mise en scène de Manos Karatzoyannis


Après des études de dessin,  photo et musique, ce dramaturge et cinéaste grec excelle dans une parole théâtrale directe et réaliste. Une lecture de sa pièce Olga l’invisible avait été faite au Théâtre de la Ville, à Paris. Avec un esprit critique et  habileté, il sait créer un suspense avec un message politique mais ouvert à plusieurs interprétations. Qui a raison et qui a tort ? Qui est le bourreau et qui est la victime, l’opprimant et l’opprimé ?  

Yannis Tsiros n’apporte pas de réponses toute faites mais des questions et crée un microcosme plein de contradictions, ambigüités et paradoxes, teinté de naturalisme et de cynisme.  Ici,  une dimanche en été, dans la cour de leur grande maison, Ioulia et Mathaios, avec Lena, leur domestique et Aris, le gardien, cherchent à savoir qui, la veille, a jeté une pierre contre la maison, provoquant des dégâts et bouleversant la vie quotidienne. Ils n’arriveront jamais à connaître le coupable mais peu importe…

Le public va  découvrir petit à petit le passé et la véritable identité de ces personnages. Et  à la fin, chacun avouera sa vérité où se mêlent le juste et l’injuste, le vrai et le faux, le secret et le mensonge. Soit un miroir de la société, face ses contradictions. Avec tout ce que cela  engendre d’inégalités et injustices entre riches et pauvres, favorisés et démunis, dirigeants et révoltés…Le metteur  en scène réussit à installer un mystérieux huis-clos dans un décor symbolique. Et à un rythme soutenu, il  souligne non-dits et sous-entendus en faisant passer la pièce du chuchotement, au cri. Dans ces dialogues « naturels, » pointent l’angoisse et l’amertume, mais aussi une sournoise étrangeté. 

Les acteurs qui insistent sur le comportement de ces personnages de classe sociale opposée et toujours en guerre, adoptent un jeu neutre qui ne trahit pas leurs arrières-pensées.  Et cela pousse le public à réfléchir à l’influence de l’Histoire sur la vie personnelle de chacun…
Un bon spectacle à ne pas rater! 

 Nektarios-Georgios Konstantinidis 

Théâtre Stathmos, 55 drómos Victor Hugo, Athènes, T. : 0030 2105230267

Κυριακή 16 Οκτωβρίου 2022

Capétan Mihalis de Nikos Kazantzakis, adaptation de Konstantina Nikolaïdi et Manolis Ionas, mise en scène de Manolis Ionas


La Liberté ou la mort (1953) est une fresque tumultueuse où le grand écrivain montre une Crète en lutte pour hâter le départ des Turcs qui l’oppriment. Le narrateur, le jeune Thrassaki, douze ans, (en fait Nikos Kazantzakis lui-même) regarde avec passion le monde crétois: le sien, pauvre, violent, subtil et digne. Avec une description vivante de Candie (Héraklion), ce grand port aux murailles vénitiennes où cohabitaient vaille que vaille les Crétois et les Turcs, leurs maîtres, riches, insolents, courageux et jouisseurs.

Le héros, le Capétan Mihalis (le père de Kazantzakis), surnommé le  Kapétan sanglier à cause d’une canine rebelle, a lui-même joué quand il était enfant dans la cour de la ferme paternelle avec le jeune noble turc Nouri Bey. Un soir, devenus hommes, ils vont au lieu de se tuer, devenir frères d’élection et mélanger leurs sangs.
Mais un jour Nouri Bey fait rencontrer sa femme du moment au Capétan, Éminé, une fière circassienne qui chante et joue de la mandoline. Le Capétan en tombe furieusement amoureux. Une étincelle qui déclenchera l’une des luttes les plus violentes contre les Turcs menée par les personnages épiques de ce roman ardent et tumultueux… Un des chefs-d’œuvre de la littérature grecque.

Il y a ici une alternance intéressante entre narration et dialogues, qui fait avancer progressivement l’intrigue avec des moments d’une forte intensité émotionnelle et le metteur en scène a su créer un rythme renforçant le suspense. Les interprètes, cinq hommes et deux femmes tout en noir, sauf Éminé dont le costume rouge connote une passion mortelle, incarnent les personnages avec une expression remarquable.
A un climat de cruauté et d’absurdité de la guerre, Manolis Ionas préfère une approche plus modérée et plus symbolique. Comme dans ces scènes où les acteurs, avec une corporalité signifiante, forment un cortège choral. Dans la pénombre, l’éclairage des bougies, et des cordes pendues accentuent le caractère rituel et la solennité de ce spectacle qui nous a beaucoup touchés.

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Spectacle vu au Théâtre Alcmène, 8-12, rue Alcmène, Athènes. T. : 00302103428650

https://www.youtube.com/watch?v=lGMnVPq8oFY