Σάββατο 25 Φεβρουαρίου 2023

Le Malentendu d’Albert Camus, traduction de Marianne Kalbari, mise en scène de Yannis Houvardas


Une pièce écrite en 1942-1943 au Chambon-sur-Lignon (un village de Haute-Loire en France  qui a  résisté de façon exceptionnelle à l’occupant allemand et accueilli de nombreuses familles juives) et où  l’écrivain soignait une tuberculose. Ce fait-divers relaté dans L’Etranger figure aussi dans plusieurs contes populaires d’Europe centrale et devient ici une allégorie de la condition humaine.

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Après avoir fait fortune au loin et s’être marié, Jan arrive incognito en Bohème dans l’auberge que tiennent sa sœur, Martha et sa mère. Elles ont pris habitude d’assassiner les riches voyageurs pour les dévaliser. L’une a des scrupules mais l’autre est mue par le ressentiment. Quand elles découvrent qui est leur dernière victime, la mère se suicide et Martha aussi, après avoir crié sa haine du monde. Il n’y a plus personne pour consoler Maria, l’épouse de Jan. Et le vieux domestique se montre insensible à sa détresse.

En somme, le fils prodigue n’a pas trouvé les mots appropriés et cet homme de bonne volonté a été un piètre metteur en scène et acteur. En se faisant passer pour un autre, il a lui-même mis en marche l’engrenage qui va le broyer. Les malencontreuses interventions du domestique empêchent ces femmes de connaître l’identité de leur future victime. La lassitude de la mère, l’inhumanité de Martha frustrée de bonheur, contribuent aussi à un dénouement qui aurait pu être évité.

Dans ce lieu clos où l’on est exilé pour toujours, les personnages communiquent difficilement et les silences sont pesants. Avec cette fable, Albert Camus actualise le vieux schéma du quiproquo tragique. Comme dans les tragédies Iphigénie en TaurideŒdipe roi et surtout Électre. Mais ici, différence fondamentale: Albert Camus venait d’écrire dans Le Mythe de Sisyphe, que le destin est «une affaire d’hommes qui doit être réglée entre les hommes». Construction en trois actes, strict respect des unités, dialogues et monologues de haut niveauon a placé Le Malentendu du côté de la tradition théâtrale, à un moment où elle était contestée.   

Chaque mise en scène de Yannis Houvardas est un essai porteur de signes, avec un méta-texte enrichissant les notions-clés, sous-entendus et non-dits. Et il demande à ses acteurs de prendre une distance par rapport au texte, et pour éviter sentimentalité et expression émotionnelle, de parler lentement et clairement.

Sur le plateau, le bar tout en longueur de l’auberge où rentrent ivres  la mère et la  fille et un praticable où Blaine L. Reininger joue des mélodies blues mélancoliques tout au long du spectacle. Il y a aussi un  cafard géant que mère et fille embrassent souvent(une marionnette, clin d’œil à Kafka). En haut de la scène, une boîte étroite comme un  cercueil:  la chambre de Jan. Un univers hypnotique et hallucinogène.

Marianne Kalbari crée avec une clarté remarquable le personnage de la Mère, une morte-vivante se décomposant au ralenti, qui veut mais ne peut pas mourir, et qui incarne la fatigue, telle une condition existentielle. Pénélope Tsilika incarne Martha, vaisseau palpitant de désirs insatisfaits et écrasés, corps souillé par sa solitude  et transformé de manière déchirante en un cygne noir qui laisse ses ténèbres se répandre.  

Flomaria Papadaki (Maria) et Anastassis Roïlos (Jan) font très bien passer tous les doutes, fêlures et phobies qui deviendront cynisme, violence et culpabilité…  Un spectacle de haut niveau à ne pas manquer ! 

Nektarios-Georgios Konstantinidis 

Théatro Technis Karolos Koun, 14 rue Frynichou, Plaka, Athènes. T. : 00302103228706.

Κυριακή 19 Φεβρουαρίου 2023

La Folle de Chaillot de Jean Giraudoux, adaptation et mise en scène de Petros Zoulias


Dès 1937, l’auteur et Louis Jouvet, son metteur en scène attitré, songeaient à une pièce dont Marguerite Moreno, monstre sacré à la Belle époque et ensuite, serait l’actrice principale. Il commence à l’écrire en 1941 et termine sa version définitive quelques jours avant sa mort en 1944. La pièce sera créée l’année suivante par Louis Jouvet avec cette actrice.

Des hommes d’affaires réunis à la terrasse de chez Francis, place de l’Alma à Paris, donc tout près de la Comédie des Champs Elysées que dirigeait Louis Jouvet, cherchent une combine très lucrative. Un prospecteur leur annonce alors qu’existerait un immense champ de pétrole dans le sous-sol de la capitale française Autour d’eux, un ballet de personnages que leur bon sens fait ici apparaître comme farfelus : un chanteur des rues, un sourd-muet, un chiffonnier, un hurluberlu et celle qu’ils appellent: la Folle de Chaillot… Elle a pris sous sa protection un jeune homme, Pierre, qui tentait de se jeter dans la Seine. Il révèle qu’un prospecteur lui avait demandé de liquider un homme qui faisait obstacle à ses entreprises. Les spéculateurs s’étant éclipsés, le chiffonnier fait la leçon à la Folle : «Le monde file un mauvais coton.»  et est «plein de mecs» qui ont mis leurs semblables en coupe réglée. «Il n’y a qu’à les supprimer», tranche la Folle de Chaillot.

Au deuxième acte, celle que les didascalies nomment maintenant Aurélie, reçoit dans un sous-sol Constance, Gabrielle et Joséphine, ses pittoresques homologues de Passy, Saint-Sulpice et Place de la Concorde, chacune avec ses lubies mais qui se rallient à son projet. A une seule condition : qu’un procès ait lieu. Et le chiffonnier acceptera de se faire l’avocat des bandits et jouera aussi l’un d’eux.
Ce procès -une pièce dans la pièce- est celui de l’argent, de la spéculation et des privilèges.
Aurélie reçoit l’autorisation d’éliminer les exploiteurs. Les présidents des conseils d’administration, prospecteurs des syndicats d’exploitation, représentants du peuple affectés aux intérêts pétrolifères de la nation, syndics de la presse publicitaire, avides, cyniques et vulgaires à souhait, sont tous attirés par l’idée de trouver du pétrole… Mais ils se précipitent dans un souterrain sans issue dont Aurélie refermera l’accès. Il suffit, déclare-t-elle en guise de moralité, d’une femme de sens pour que la folie du monde se casse les dents. Et, au chiffonnier, elle lance : « Dès que menacera une autre invasion de vos monstres, alertez-moi tout de suite.

Ici, invraisemblance et fin faussement optimiste digne de Guignol mais jamais l’écrivain n’avait pourtant mis autant de fantaisie que dans cette pièce où s’annoncent l’absurde et l’insolite du Nouveau théâtre. La verve du satiriste est souvent mordante quand il donne la parole aux financiers : «Là où nous passons, dit l’un, ni le gazon ni le monument ne repoussent. Et pour un autre : « Les billets de cent francs sont aux riches et non aux pauvres. « Vous avez les capitaux ? J’ai un démarcheur-coulissier. »
Pour Arthur Miller, Jean Giraudoux a écrit l’acte d’accusation le plus direct qu’on ait jamais dressé contre l’exploitation capitaliste. Les Français lui ont parfois préféré Paolo Paoli d’Arthur Adamov ou La Résistible Ascension d’Arturo Ui de Bertolt Brecht mais aujourd’hui la modernité de cette pièce est plus dans un dialogue pétillant d’inventions loufoques.  «A midi, tous les hommes, dit Aurélie, s’appellent Fabrice. » Ou encore: «Tout chien, sans son vrai nom, maigrit.» Et « Vous ne devez pas caresser Dicky quand il n’est pas là, dit Constance. C’est mal… » Bref, le premier Eugène Ionesco n’est pas loin.

Petros Zoulias met en scène à nouveau ce chef-d’œuvre classique mais le ramène, en soulignant sa pertinence, aux temps actuels. Cette pièce fut l’un des grands succès de Katína Paxinoú avec Alexis Minotis, au Théâtre National d’Athènes en 1966. Quinze ans plus tard, Andreas Voutsinas, pour le Théâtre National du Nord de la Grèce, lui donne une nouvelle vie avec Despo Diamantidou. Une interprétation historique… Antigone Valakou en 2003, mise en scène par Koraïs Damatis, puis Anna Panagiotopoulou, dirigée en 2014 par Petros Zoulias ont aussi joué Aurélie au Théâtre National d’Athènes.

Ici, Petros Zoulias accentue l’esthétique du conte avec joyeux et oniriques,  un décor majestueux très coloré, de beaux costumes de Deni Vachlioti, une musique originale de la grande compositrice Evanthia Reboutsika, les lumières de Melina Masha et une traduction avec références discrètes au monde contemporain: mails, s.m.s., réseaux sociaux… comme aux féminicides et autres fléaux.

Elissavet Konstantinidou crée une Aurélie sensible, romantique et prête à changer le monde. La dernière scène nous restera en mémoire: quand les exploiteurs la menacent avec une arme, elle descend du plateau, s’avance vers le public  et l’incite à suivre ses rêves. Et la scène du procès est aussi remarquable avec Nikos Moutsinas (Le Chiffonnier) dans un excellent monologue. Petros Zoulias est arrivé à garder l’esprit politique du texte  et pour lui Jean Giraudoux est une sorte de Brecht parisien. Il a également adouci une langue parfois académique et a rendu accessible l’œuvre de cet écrivain à un large public. Le metteur en scène a aussi essayé de simplifier sans trahir- le mal est puni, le bien triomphe- de divertir sans recettes faciles et faire réfléchir, tout en n’étant pas ennuyeux… A consulter: un riche programme-livret avec textes sur Jean Giraudoux, la pièce et ses mises en scène, et de nombreuses photos.

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Théâtre Pallas, 5 rue Voukourestiou, Athènes. T. : 0030 2103213100


https://www.youtube.com/watch?v=RjKF_XgYWr0

Παρασκευή 17 Φεβρουαρίου 2023

Δυσαρμονίες (Tone Clusters) de Joyce Carol Oates, traduction de Nikos Hatzopoulos, mise en scène d’Antonis Antoniou


Cette auteure américaine de quatre-vingt cinq ans s’est essayée à plusieurs genres: poésie, romans et nouvelles, théâtre, essais mais elle privilégie un thème, celui des passions perverses et destructrices.  Son œuvre se situe dans la tradition du roman naturaliste mais Joyce Carol Oates s’attache moins à expliquer les situations d’oppression, qu’à faire surgir de manière obsédante, le couple fantasmatique de la victime et du bourreau.

Dans cette pièce (1990), les parents de Carl sont interviewés dans un studio de télévision pour défendre leur fils, accusé de viol et meurtre d’une jeune fille de quatorze ans. Est-il coupable ? Les preuves sont accablantes. Mais dans quelle mesure sont-ils prêts à les voir ? Et comment cette interview peut-elle éclairer cette triste affaire? Des questions qui, même si elles ont une réponse, en créent de nouvelles qui, elles, restent sans réponse. Quand la voix d’un journaliste leur pose des questions tortueuses, l’interview tourne alors pour eux au cauchemar. Combien de temps pouvons-nous vivre dans l’ignorance? Comment éviter la vérité, en créant autour de nous, celle qui nous convient? À quel point sommes-nous coupables, quand nous nous murons dans notre silence?

L’auteure critique durement le mode de vie américain et les valeurs d’une société qui s’étend au-delà des frontières d’un pays. Elle décrit en particulier la tragédie de ce couple ordinaire qui a peur du crime, de la télévision, et même de leur voisin. Malgré leur calme apparent, l’enchevêtrement de leur vie qui se dénoue lentement, va les mener à la tragédie. Cela se passe dans un studio de télévision et le metteur en scène souligne la gourmandise des médias à utiliser le drame de gens comme une marchandise pour faire gagner leur chaîne en popularité. Le père et sa femme (excellents Antonis Antoniou et Natasha Assiki), perdus dans un tourbillon d’interrogations et incapables de juger objectivement les faits, se battent pour que leur fils soit celui qu’ils croient, et non celui que la réalité les oblige à voir.
Nous entendons seulement la voix du journaliste et cette distance nous rend plus capables de juger les faits avec un esprit critique. Son discours torrentiel est celui du représentant d’une culture et d’une classe, dites supérieures. Il incarne aussi la position dominante de ceux qui travaillent dans les médias mais il a du mal à intégrer les éléments d’informations actuels sur l’homme et la femme. Après le spectacle, les acteurs discutent avec le public et nous sortons riches en émotions. Ils nous ont fait réfléchir à nouveau sur la notion de responsabilité individuelle…

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Theatriki Skini, 84 rue Naxou, Athènes, T. : 0030 2102236890

En Cas de meurtre est publié  chez Actes Sud-Papiers (1996). De nombreux autres livres de l’écrivaine sont édités chez Stock et Biblio, Livre de poche

Δευτέρα 13 Φεβρουαρίου 2023

Le Visiteur d’Eric-Emmanuel Schmitt, traduction de Sotiris Tsafoulias et Antoine Galeos, mise en scène de Sotiris Tsafoulias


Une pièce créée à Paris en 1994. Après son succès français puis international, le jeune auteur franco-belge quittera son poste à l’Université pour se consacrer à l’écriture. Il imagine ici une situation fantastique la visite d’un personnage divin chez un autre, mais historique celui-ci  Sigmund Freud. Nous sommes à Vienne en 1938 dans son cabinet à la fois réel et irréel, un salon austère avec un divan et un bureau dont le plafond est un ciel étoilé ouvert sur l’infini. En dix-sept scènes, Eric-Emmanuel Schmitt montre les hésitations politiques de Freud. Doit-il rester sur place et entrer dans la Résistance, ou fuir l’Autriche annexée par l’Allemagne nazie? Entre alors un mystérieux personnage, le Visiteur qui nous offre l’occasion d’entrer plus profondément dans le débat philosophique de Freud avec Dieu, et le défi de la psychanalyse.

La pièce s’ouvre sur un dialogue entre Freud et sa fille Anna: lui, énergique, luttant contre la vieillesse et un cancer de la gorge. Et elle, entière mais qui a un grand amour pour son père. Elle lui conseille l’exil et le pousse à signer le papier qui l’y autorise, mais cela a un prix : la reconnaissance et l’éloge du régime. Freud refuse donc, par solidarité avec ceux qui restent. Un officier nazi fait alors irruption et exerce un chantage sur la famille.
Le psychanalyste sauve ses statuettes mais remet tout son argent au nazi qui a des propos antisémites. Anna se met en colère et l’officier l’emmenèra. Freud est désespéré et surgit alors un inconnu : le Visiteur qui semble tout connaître de son passé, de son présent et même de son avenir. Freud le soumet à l’hypnose et lui fait révéler tout ce qu’il sait. Cet inconnu échappe à toute humanité et s’est incarné pour lui rendre visite.
Jusqu’à la fin, le psychanalyste doutera de cette présence et se demandera si son Visiteur n’est pas un malade, d’autant plus que l’officier nazi va lui révéler qu’un fou s’est échappé de l’asile. Ce doute n’empêche pas une discussion sur le sens de la vie, l’existence de Dieu, son impuissance devant le Mal et la liberté des hommes. Le Visiteur donne alors à Freud un argument stratégique pour que l’officier nazi cesse son chantage et fasse revenir Anna. Freud tire sur l’Inconnu pour vérifier son degré de réalité mais rate son coup. Nous resterons dans l’indécision… Ce rêve aura permis de sonder le débat qu’eut Freud avec la religion, et plus généralement, avec la question de Dieu, quand eut lieu l’extermination nazie.

Sotiris Tsafoulias renforce le mystère et le débat philosophique, avec des allusions politiques dans ce spectacle qui touche profondément le public. Ce jeune réalisateur, reconnu en 2016 pour son film L’Autre moi (Eteros ego) qui lui a apporté la notoriété, met en scène toutes les questions existentielles, religieuses ou psychanalytiques du Visiteur. Rythme et suspense, éclairage et musique soulignent l’ambiguïté et les acteurs sont excellents, en particulier Manos Vakoussis (Le Visiteur) qui exprime remarquablement le doute et la peur de l’inconnu.
Un spectacle à ne pas manquer ! 

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Fondation Michel Cacoyannis, 206, rue Peiraiws, Athènes. T. : 00302103418550

https://www.youtube.com/watch?v=K0Wuw0e2fAE

Le livre-programme avec la traduction intégrale en grec est publié aux éditions Kapa.

Σάββατο 11 Φεβρουαρίου 2023

Berlin Alexanderplatz, adaptation du roman d’Alfred Döblin, mise en scène de Stathis Livathinos


Publié sept ans après Ulysse de James Joyce et quatre ans après Manhattan Transfer de John Dos Passos, ce roman allemand  s’inscrit en 1929 dans la modernité du monologue intérieur. Et son auteur se revendique omniscient mais aussi narrateur souverain et intervenant donc subjectivement dans son récit. Il se veut surtout le constructeur d’une œuvre qu’il appelle épique et par là-même, refuse d’écrire un roman qui serait fondé sur l’intrigue, l’action, la psychologie. Il préconise un récit libéré de tous dogmes, pour arriver à une composition polyphonique.

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Il relate ici le parcours de Franz Biberkopf, un délinquant à peine sorti de prison, qui retrouve le monde de la pègre et sent bien qu’il lui sera impossible d’en sortir. Berlin Alexanderplatz n’est pas un roman social ou populiste, même si les bas-fonds interlopes y sont très présents. Alfred Döblin a recours, avec de nombreux leitmotivs, aux mythes antiques et bibliques. Mais cette parabole censée exister dans un présent daté avec précision, est ici transcendée par une sorte d’histoire de l’humanité, dans une lutte éternelle entre le Bien et le Mal. Biberkopf a comme destin de retrouver symboliquement, devant les exigences de l’ «être collectif», le sort de l’Humanité tel qu’il a été illustré par les grands mythes : orgueil, faute, sentiment de culpabilité, expiation, sacrifice de soi et humilité consentie. Originalité de Berlin Alexanderplatz dans la littérature allemande : la ville moderne ne forme plus, comme dans le roman du XIX ème siècle, un simple décor mais elle vit, bouge, respire… Pour traduire son existence, Alfred Döblin utilise collages de publicités, articles de journaux, affiches, statistiques… et jongle aussi avec tous les langages possibles:  des rengaines, aux chants militaires, des discours politiques, à l’argot de la pègre, et au yiddish. En les intégrant à son récit, il donne à son personnage, à travers ses mésaventures anecdotiques, l’ampleur d’un héros épique.

Ce roman, adapté au cinéma par Phil Jutri dès 1931, l’a été aussi pour la télévision, cinquante ans plus tard par R.W. Fassbinder. Dans cette adaptation scénique, Stathis Livathinos a réussit à nous en offrir la quintessence.  Cette réalisation de très grande qualité, avec un rituel des séquences renforçant la parabole sans être didactiques en deux heures et demi. Mais à un rythme rapide, souvent « orageux », où, comme dans le livre, viennent s’intercaler des chansons, etc. Il y a une richesse de stimulis à l’esthétique cabaret mais aussi des éléments grotesques. Les personnages prennent forme, bien servis par onze acteurs qui jouent plusieurs rôles. Le mécanisme est bien réglé: la plupart a déjà très souvent travaillé avec Stathis Livathinos et il y a donc un code de jeu commun. Musique de scène, et des chansons, tout à fait exceptionnelle… Eleni Manolopoulou réussit à utiliser pour sa scénographie chaque  espace avec une liberté et une poésie remarquables. Et les costumes et maquillages sont « d’époque ». Un des meilleurs spectacles actuels. A ne pas manquer..

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Théâtre Odou Kykladen-Lefteris Voyatzis, 11 rue Kykladen, Athènes.  T. : 00302108217877.
Excellent et riche en informations : le livre-programme dont le matériau a été recueilli par Elena Karakoulis.
https://www.youtube.com/watch?v=fJgF3IU1Ups

Πέμπτη 2 Φεβρουαρίου 2023

Mademoiselle Marguerite de Roberto Athayde, traduction de Kostas Tachtsis, mise en scène de Yannis Margaritis


Là pièce de cet auteur brésilien créée en 1997 à l’Ambassador Theatre à Broadway est devenu un succès et a été jouée un peu partout dans le monde. Dans un milieu scolaire dystopique des sociétés occidentales, Mademoiselle Marguerite, difforme, colérique, mal aimée, presque hystérique est dans l’école primaire d’ un bidonville l’institutrice d’ enfants qui vivront à jamais entre les murs du besoin et de la pauvreté. 

Mademoiselle Marguerite, figure du cauchemar le plus sombre, a pris sur elle de façonner l’âme de ses jeunes élèves, à sa ressemblance et à celle de la société où ils seront les « enfants d’un Dieu inférieur ». Pour les former à l’obéissance, à la discipline et aux ordres d’une autorité qui émane du « Dieu américain » (l’argent). Mais Federico García Lorca disait : «  je suis le partisan des pauvres, de ceux qui n’ont rien et à qui on refuse jusqu’à la tranquilité de ceux qui n’ont rien »

Yannis Margaritis renforce le message politique de la pièce et crée un spectacle d’une grande qualité. Cela se passe dans une grande salle de classe avec des graffitis et en commentaire, des projections vidéo commentent ce monologue. Sur une musique de Stamatis Kraounakis cette grande actrice qu’est Catherine Maragkou joue de façon exceptionnelle, avec désespoir et humour, entre tragique et ridicule, cette Mademoiselle Marguerite, bourreau et victime d’un système de manipulation sociale. 

Allez voir absolument ce spectacle!

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Théâtre Alma, 15 rue Akominatou, Athènes, T. : 00302105220100.

https://www.youtube.com/watch?v=G5PH4VMe4u4