Τετάρτη 6 Μαρτίου 2019

P.O. Box Unabomber de Zdrava Kamenova et Gergana Dimitrova, traduction de Dimitris Vergados, mise en scène de Stavros Stagkos

Cette pièce a remporté  le prix Ikar  2.012 de l’Union des artistes bulgares pour le meilleur texte dramatique. Ses auteurs citent souvent Le Manifestede Ted Kaczynski, dit Unabomber, un militant écologiste américain né en 1942, qui s’est battu contre la société industrielle. Il deviendra un terroriste qui fit l’objet de la chasse à l’homme la plus coûteuse de l’histoire du  F.B.I. . À la suite de la disparition d’un lieu naturel où il se rendait régulièrement, il envoya de  nombreux colis piégés à plusieurs personnes construisant ou défendant le « progrès » technologique.  Et cela durant dix-huit ans; bilan: trois morts et vingt-trois  blessés .
Les auteurs mettent l’accent sur le fait que la technologie, plutôt que de faire avancer l’humanité, la détruit. Comme en contrepoint, ils décrivent le voyage de la dernière femelle d’une espèce en voie d’extinction: l’échidné à long nez, et sa tentative de trouver un compagnon pour éviter de disparaître à jamais. D’un côté, l’Homme qui pense possible d’échapper à la surveillance des satellites et de l’autre, une créature croyant qu’elle ne disparaîtra jamais bien qu’elle soit la dernière de son espèce…  Une réflexion profonde quant aux impasses de l’évolution : celle des hommes, des animaux, de la Nature et  de la société. En cause: des technologies qui se développent de plus en plus vite, des scientifiques auto-satisfaits, la mort proche d’espèces biologiques, la famille humaine qui se dégrade. Un activiste écolo essayera de changer le monde: mais échouera et deviendra juste un simple terroriste. Les personnages essaient de se faire entendre dans un monde qui devient de plus en plus aliéné. Sans visage, ils sont des voix dans la nuit. Sans nom, il semblent s’être perdus dans le temps et dans l’espace, sans aucune chance d’entrer en contact entre eux.
Un homme disparaît et va tout seul dans la montagne, revenant à la fois vers la Nature et vers lui-même. La police et sa famille le cherchent. Inversement, un animal femelle quitte sa forêt et va dans le monde des hommes pour chercher un mâle. Des scientifiques essaient de construire un ascenseur cosmique. Et un satellite supervise tout et tous sur la Terre… Le système actuel peut être changé par la violence ? Pourquoi le plus ancien mammifère est-il menacé de disparition ? Pourquoi les êtres humains veulent aller toujours plus loin et plus loin ? Vers où, tout cela nous mène ?
Dans un décor symbolique, Stavros Stagkos combine divers instantanés comme dans un film  pour souligner le message politique. Sons et musique, éclairage et projections vidéo renforcent le suspense et l’intensité de l’action. Le solide collectif de comédiens  se met au service du texte. Entre autres, Ioanna Kanellopoulou incarne avec une expression remarquable la femelle en voie de disparition. Bref, un spectacle-commentaire du monde contemporain qui fait réfléchir de nouveau sur  l’avenir de notre planète…
Nektarios-Georgios Konstantinidis
Bar-Théâtre Faust 12 rue Athinaïdos, Athènes, T. : 0030 210 32 34 095.

Κυριακή 3 Μαρτίου 2019

Le Club des parenticides d’Ambrose Bierce, traduction, adaptation et mise en scène de Georgia Andreou

Ambrose Bierce, né dans l’Ohio en 1842, disparaîtra dans des conditions mystérieuses au Mexique à Chihuahua en 1913. La guerre civile où il est immergé de ses vingt à ses vingt-cinq ans, sera pour lui une expérience à la fois traumatisante et un apprentissage profond de l’humanité. On la retrouvera en permanence en arrière-fond de son œuvre fantastique. Il est l’un des premiers à inaugurer la figure de l’écrivain-enquêteur de terrain, ce qui expliquerait qu’il n’ait pas été admis à sa vraie place dans le panthéon de la littérature américaine.
Maître incontesté de l’humour noir (hélas omis par le surréaliste André Breton dans l’anthologie  qu’il dressa avec son Dictionnaire du diable maintes fois réédité, Ambrose Bierce fut sans doute le plus british des écrivains américains. Auteur d’une œuvre foisonnante et hétéroclite, tour à tour journaliste, topographe, écrivain pamphlétaire, il a signé une centaine de nouvelles, axées très souvent sur la mort de l’individu et l’absurdité de la vie. On retrouve l’humour au vitriol d’Ambrose Bierce dans certains de ses écrits où il raconte les destins surnaturels et les funestes hallucinations de ses personnages.
Regroupées sous des titres comme Contes noirs, Fables fantastiques ou De telles choses sont-elles possibles? ces histoires fantastiques représentent la part la plus importante de son œuvre. Souvent racontées à la première personne du singulier, elles résonnent comme de petites scènes horribles font la part belle à la psychologie et aux songes hérétiques d’individus sans raison. Au gré des pages, on rencontre un sacré bestiaire : une machine ayant pris le contrôle de son inventeur, un  Club des Parenticides cherchant les moyens les plus optimaux pour exterminer un proche, de lugubres apparitions nocturnes, de nombreux fonctionnaires corrompus, des soldats perdus et même un Ésope revu et corrigé. Le tout,  bien entendu, des plus macabres.
Georgia Andreou a adapté Le Club des Parenticides, une satire exposant les mille et une raisons de se débarrasser de ses géniteurs:  un bel exemple de nihilisme glacé…  Le spectacle baigne entre  gothique et grotesque mais avec un message politique où l’auteur condamne  la violence arbitraire du pouvoir dans les régimes totalitaires. Les balades obscures et les mélodies dures du group doom sludge metal Okwaho présent sur scène tout au long du spectacle, mettent en valeur le psychisme des héros, accompagnent l’action et nous poussent vers un espace clos et sans issue. La metteuse en scène combine paroles et musique pour sensibiliser le public à l’atrocité des crimes. Il s’agit aussi d’un cri d’éveil quant aux valeurs spirituelles, morales et sociales.
Les comédiens sont les narrateurs de quatre histoires et incarnent aussi les personnages qui décrivent avec minutie comment ils ont tué leurs parents. Vidéos et lumières contribuent au mysticisme comme à la terreur des meurtres commis. Dimitris Mandrinos raconte Oil of dog avec cynisme. Alexandros Filippopoulos joue avec un remarquable expressionnisme gestuel  The Hypnotist. Spyridon. Xenos fait une description dégoûtante dans un monologue An Imperfect conflagration. Marvina Pitychouti, devant une salle de tribunal imaginaire, souligne le caractère macabre de My Favourite murder.
Bref, une « métal performance » que les amateurs du genre  apprécieront beaucoup.
Nektarios-Georgios Konstantinidis
Michael Cacoyannis Foundation, 206 rue Peiraiws, Athènes. T. : 0030 210 34 18 550