Τρίτη 31 Μαΐου 2022

Byron, La liberté à mort, conférence-spectacle de Sylvain Tesson


À l’occasion de son dixième  anniversaire, Le Figaro-Histoire a choisi Athènes, berceau de la démocratie, pour remonter aux sources de la culture occidentale avec conférences à l’Académie d’Athènes, rencontres et spectacles. Deux journées organisées en partenariat avec la mairie d’Athènes, avec le soutien de l’Organisation Nationale du Tourisme Grec. Le premier soir, au cinéma Thissio dont la vue est magnifique, Lydia Carras a présenté l’œuvre importante d’Elliniki Etairia, une association activiste qui lutte depuis 1972 pour la protection de l’environnement, du patrimoine culturel et naturel, à l’intérieur comme à l’extérieur de la Grèce. Et nous avons aussi assisté au spectacle-hommage à la Révolution grecque, au grand poète Lord Byron qui a traversé le siècle comme un météorite incarnant à la fois la liberté, la rage, l’excès du romantisme.

En 1824, il accoste à Missolonghi pour contribuer à sauver la liberté et la culture du peuple grec. Il sait bien le danger qu’il court mais relativise l’idée même de sa propre mort. En remettant au goût du jour une notion ancestrale: il faut être joyeux d’avoir vécu, au moment de quitter ce monde. Une résolution ultime du poète: retrouver, après les mots, une forme de romantisme sur le terrain et ses textes ont pour thèmes: mémoire, courage, amitié et mort… des thème qui sont aussi à l’amorce des réflexions de Sylvain Tesson sur le philhellénisme et sur la forme qu’il pourrait prendre aujourd’hui.

William Mesguich interprète de façon émouvante des extraits choisis par Sylvain Tesson : sur scène, ils alternent narration et dialogue et ont ému un public à la fois français et grec. Nous entendons aussi la parole de Victor Hugo qui, dans Les Orientales, peint quatre siècles en un vers : « Le Turc a passé là, tout est ruine et deuil. » Ce frottement entre le XIXème et le XXIème siècle, est aussi une confrontation de langage et de formes d’écriture. Et spectaculaire au sens où le personnage lui-même de Byron appelle un tourbillon de panache et de poésie,

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Conférence-spectacle donnée le 27 mai au Ciné Thissio, 7 Apostolou Pavlou, Athènes.

Δευτέρα 30 Μαΐου 2022

Antigone de Sophocle par le Théâtre Démodocos, traduction et mise en scène de Philippe Brunet



Cette compagnie de théâtre antique, qui porte le nom de l’aède aveugle dans L’Odyssée, a été créée par Philippe Brunet en 1995 pour dire et jouer l’épopée d’Homère et interpréter la musique grecque ancienne. Il est l’auteur d’une thèse de doctorat sur Le vers dactylique lyrique dans la tragédie grecque. En 2005-2007, la compagnie a dit à trois reprises toute L’Iliade. Puis a lancé, avec la Sorbonne le festival des Dionysies en 2006 et chaque année, fait battre le cœur de Paris au rythme de grandes œuvres de l’Antiquité. Elle joue Antigone depuis 2005 mais Philippe Brunet en a modifié la mise en scène, comme l’a suggéré de Yoshi Oida, le grand acteur de Peter Brook. Antigone avec Œdipe roi est le chef-d’œuvre de Sophocle qui a créé cette héroïne féminine symbolisant la supériorité des lois non écrites sur les lois écrites. Autrefois, le Groupe de Théâtre Antique de la Sorbonne, fondé entre autres par Roland Barthes, a recréé en mai 1936 Les Perses d’Eschyle dans la cour de la Sorbonne, puis à Épidaure (Grèce), Vaison-la-Romaine, Parme, etc.  avec personnages demi-masqués et douze choreutes. Aujourd’hui, la troupe Démodocos  lui a, en quelque sorte, succédé.

Le spectacle (en français avec quelques répliques en grec ancien) qui nous a profondément touchés ; s’est joué le site de la Pnyx où on a une vue magnifique sur l’Acropole et le mont Lycabette. Sur cette colline, les citoyens débattaient des questions essentielles à la vie de la Cité. Philippe Brunet qui a mis en scène Henri de Sabates (Ismène, Le Garde, Tirésias et Eurydice), Philippe Brunet (Antigone et Hémon) et Nicolas Lakshmanan (Créon, Le Messager) respecte la règle des trois acteurs masqués, telle qu’Aristote l’avait énoncée dans sa Poétique en attribuant à Sophocle, l’introduction d’un troisième acteur. Le Chœur est masqué lui aussi: Maël Bailly à la flûte, François Cam, le compositeur (à la lyre) et Yannis Cleret. Avec un double travail de chant rythmé en grec et de prosodie en français. A cette scansion assortie d’une création musicale selon les règles harmoniques retrouvées par les musicographes de l’Antiquité comme François Cam, s’ajoute un travail de chorégraphie expérimenté au fil des ans. Le battement des pieds rythme le vers antique : l’anapeste: trois syllabes avec deux brèves suivies d’une longue, le dactyle avec une longue et deux brèves…

«Être contemporain pour les personnages d’Antigone dit Philippe Brunet, ce n’est pas rejoindre l’actualité culturelle et la revendication strictement politique (l’erreur de Créon), mais prendre conscience des structures religieuses fondant le cosmos, et des personnages mythiques. Mettre en scène Antigone, c’est aussi faire parler le grec ancien, langue de mémoire, fondamentale, non pas élitiste et bourgeoise, mais trans-communautaire, et qui doit être mise à la portée de tous, à travers le rythme du français, dans un échange prosodique infini.
Faire entendre le grec ancien, ce n’est pas chercher à imiter ou à reconstituer une pièce selon une démarche académique fondée sur une prétendue archéologie mais essayer de réintroduire le rituel fondateur de l’acte théâtral. Avec loyauté et sans référence existante dans l’absolu.
Le théâtre devient alors nomade sur la route de la Soie qui a conduit les masques grecs jusqu’au Japon et à Bali. En revenant de l’Extrême-Orient, on peut réapprendre à associer rythme de la parole et rythme des pas, en recréant cette machine vivante de théâtre proche de la marionnette qu’est l’acteur masqué. »

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Spectacle vu le 28 mai sur le site de la Pnyx, aux Journées athéniennes, en partenariat avec Le Figaro Histoire, la Mairie et l’Académie d’Athènes.

Τετάρτη 25 Μαΐου 2022

Une Femme sans importance d’Oscar Wilde, traduction de Suzanne Houlia, mise en scène de Kostis Kapelonis

 Cet écrivain irlandais né à Dublin en 1854, et mort à Paris dans la misère en 1900, incarne le mouvement esthétique décadent de la fin du XIX ème siècle. Les pièces de ce grand dramaturge tenant de l’art pour l’art, amateur de paradoxes, fasciné par le masque et l’ambiguïté, eurent un grand succès. La médisance et l’esprit le plus brillant s’y donnent libre cours. Ici, Oscar Wilde se livre à une satire de la haute société londonienne,  en suggérant discrètement à ces aristocrates au moralisme superficiel mais sévère, la valeur de l’indulgence et du pardon.

©Χρήστος Συριώτης,

©Χρήστος Συριώτης,

Dans Une Femme sans importance (1894), le charismatique et charmant gentleman Lord Illingworth a offert un poste de secrétaire à Gerald Arbuthnot dont Mrs Alburthnot, sa mère réalise que ce Lord Illingworth est le père de Gerald. Elle avait eu une aventure avec lui vingt ans auparavant, était tombée enceinte et l’a élevé seule son enfant. Elle avait en effet refusé d’épouser son amant et était donc à l’époque une femme déchue…
Le fils découvre le passé de sa mère et essayera de tuer Lord Illingworth qui avait embrassé la belle Hester Worsley dont il est amoureux. À la fin, Hester Gerald et Mrs Alburthnot quitteront l’Angleterre pour l’Amérique où ils espèrent vivre dans une société qui ne juge pas les femmes aussi sévèrement.

 Dans une réalisation simple, Kostis Kapelonis souligne le cynisme, le côté mélo mais aussi le comique et l’esprit satirique de cette pièce que les costumes accentuent encore. Les acteurs de la compagnie Synthiki mettent leur jeu au service d’une lisibilité de l’action. Nous avons clairement entendu le message d’une œuvre rarement montée en Grèce, et c’est l’essentiel.

 Nektarios-Georgios Konstantinidis

 Théâtre Technis, Karolos Koun, 5 rue Pesmazoglou, Athènes. T. : 00302103228706.

Δευτέρα 23 Μαΐου 2022

Hariklia Cavafy, texte et mise en scène de Koraïs Damatis


Nous sommes en 1899. Dans un monologue lyrique et plein de tendresse, la mère du grand poète grec Constantin Cavafy (1863-1933) se livre à un bilan mélancolique -elle a soixante-cinq ans et c’est le dernier jour de sa vie- dans son appartement, rue Ramliou à Alexandrie (Egypte). Constantin est le dernier des neuf enfants de Petros Cavafy, un négociant en import-export de textiles et de Hariklia Photiadis, la fille d’un diamantaire. Originaires de Constantinople ils s’étaient installés à Alexandrie. Petros décède en 1870 et la famille s’installe alors en Grande-Bretagne. Cela marquera profondément Constantin et ses écrits montrent une grande familiarité avec la tradition poétique anglaise.  Comme  le dit Marguerite Yourcenar dans la préface de sa traduction de ses poèmes :« C’est aussi l’un des plus grands, le plus subtil en tout cas, le plus neuf peut-être, le plus nourri pourtant de l’inépuisable substance du passé. »

Hariklia parle beaucoup de ses neuf enfants et, avec force détails, raconte les difficultés qu’elle a eues pour les élever. Cette famille ruinée reviendra vers 1879 à Alexandrie, puis, anticipant les émeutes de 1882 qui allaient précipiter la guerre anglo-égyptienne, se réfugie à Constantinople. Et plus tard,  de nouveau à Alexandrie. Hariklia parle plusieurs fois de son unique fille unique qui est morte. Elle se souvient aussi de son attitude étrange à faire porter des habits féminins au petit Constantin et parle, avec une angoisse discrète, de ses premières relations homosexuelles. Et ici, la relation mère-fils est dessinée avec une écriture poétique et de fortes images.

Dans un décor-collage de photos et poèmes, Aspassia Kralli, cette grande actrice, connue pour son «théâtre du silence» et des spectacles de mime, excelle à incarner cette mère avec une sincérité et une douceur qui nous touche profondément. Elle nous invite à penser nos nôtres et à tous les sacrifices qu’elles ont faits pour nous rendre heureux…

 Nektarios-Georgios Konstantinidis

 Théâtre Vault, 26 rue Melenikou, Athènes, T. : 00302130356472.

Παρασκευή 20 Μαΐου 2022

Campagne de Mihalis Virvidakis, mise en scène de Georges Skevas

 


Ce metteur en scène et auteur dramatique a suivi l’école de Pelos Katselis à Athènes et a débuté comme acteur et assistant à la mise en scène. En 1991, il crée sa compagnie Mnimi et dix ans plus tard, s’installa à La Canée en Crète, où il fonda un atelier d’art et jeu dramatiques. Avec les comédiens qui y sont formés, il mène des recherches scéniques et au Kydonia, lieu permanent de sa compagnie depuis 2002, il monte des textes de Samuel Beckett, Harold Pinter, David Mamet, Thomas Bernhard, Jon Fosse, Peter Handke, Lars Norén… Il a écrit La Lune et la Lire, primé au concours annuel 197 d’écriture dramatique des jeunes auteurs en 1987, Phares allumés sur la nationale, une pièce créée dix ans plus tard au théâtre de Lefteris Voyatzis en 1997 et qui a été élue meilleure pièce grecque à la Bonner Biennale en 1998 et De Natura.



Cette quatrième pièce sous-titrée Une Histoire de Noël  est une allégorie poétique en quinze tableaux et deux actes sur la notion d’identité nationale, les problèmes de corruption, les injustices, hypocrisies et mensonges des politiciens, la crédulité et les superstitions du peuple, les impasses et vérités enterrées de notre société… Dans cette histoire dite policière à la théâtralité de haut niveau, , l’écrivain nous livre ses réflexions socio-politiques et ses angoisses sur l’avenir de la Grèce. Avec sept personnages aux scènes en mosaïque-miroir dans un microcosme villageois, loin de grands centres cosmopolites luxueux. Mais cela peut aussi se passer là n’importe où victimes et bourreaux s’entrecroisent avec des les limites peu discernables entre eux…

Trois jeunes d’un village, le fils d’un député, celui d’un pope qui bégaie et un rebelle qui se déclare anarchiste, vont préparer le cambriolage d’une banque. Chacun a ses raisons, le premier veut se venger d’un père autoritaire et hypocrite, l’autre pour acquérir le respect de ses amis et le dernier pour défendre une idéologie contestataire.

L’écriture scénique de Georges Skevas est d’une clarté et d’un réalisme qui traduit bien l’esprit du texte. L’éclairage occupe ici une place-clé en définissant les changements d’espace et en reflétant les arrières-pensées des personnages. Les comédiens créent des personnages complexes au corps agile et oscillent entre le dramatique et le comique. Nous avons de bons dramaturges en Grèce et en sommes fiers ! 

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Théâtre de la rue Cyclades-Lefteris Voyatzis, 11 rue Cyclades, Athènes. T. : 00302108217877

Τρίτη 17 Μαΐου 2022

Labor d’Anthi Tsirouki, mise en scène d’Emilie Louizou


Dans cette pièce de la  jeune dramaturge, un couple de médecins en chirurgie esthétique, isolé et stérile, «adopte» un jeune amnésique auquel il a tendu un piège quand, après un accident, il avait sonné à leur porte. Le couple fera renaître ce jeune homme selon ses conditions,  et il deviendra leur fils… 

Ici, la metteuse en scène a renforcé l’atmosphère de thriller dystopique et de suspense, avec toute la terreur et le macabre nécessaires. Le maquillage accentue le résultat de leur obsession à intervenir sur le corps humain et à le transformer pour vaincre le temps qui passe. Grâce au décor et aux éclairages, Emilie Louizou réussit à créer un univers aseptisé et à susciter l’émotion.

Stelios Mainas et Ioanna Pappa forment un couple exceptionnel à l’esprit malsain et le jeune comédien Orestis Chalkias est cette victime d’amnésie  à la candeur sensuelle. La pièce a été sélectionnée avec d’autres,  au séminaire d’écriture théâtrale qui a été donné au  Poreia, dirigé par ces dramaturges reconnus que sont Vaggelis Hatzigiannidis et Thanassis Triaridis. A ne pas manquer !

 Nektarios-Georgios Konstantinidis 

Théâtre Poreia, 3-5 rue Trikorfwn, Athènes, T. : 0030 2108210991  

https://www.youtube.com/watch?v=kwJBr6Voftg&t=12s

Mrs Dalloway d’après le roman de Virginia Woolf, performance du Ginger Creepers Theater Band


Dans ce roman célèbre publié en 1925, l’écrivaine britannique décrit une journée de Clarissa Dalloway, une femme de la haute société dans l’Angleterre, après la première Guerre Mondiale. Avec, comme thème principal: l’altérité, qu’il s’agisse de soi face aux autres ou d’un face-à-face entre soi et soi-même. Mrs Dalloway apparaît comme une personnage mondain, puisqu’elle prépare au cours de la journée une réception qui aura lieu à la fin du roman. Elle est alors en représentation et joue son rôle d’hôtesse de maison comme un chef d’orchestre.

Bien qu’il s’agisse de la même personne, il y a une distinction entre la Clarissa représentée dans son intériorité et comme une personne qui pense et qui sent. Et cette Mrs Dalloway qui est le moi public du personnage, avec une situation civile et sociale.  Cette crise existentielle au cœur du roman, laisse des zones d’interrogation, notamment quant aux raisons ayant poussé Clarissa à quitter l’homme qu’elle aimait, pour se marier avec un inconnu qui, lui, « présente bien ».

Grigoris Hatzakis a crée ce spectacle où la musique joue un rôle primordial, sur la scène de Parenthèse, une nouvelle salle d’art. Metteur en scène toujours inventif, il a mis la scission du personnage au centre de cette adaptation et il nous surprend avec des trouvailles comme des descriptions au micro. Au fond du plateau, un projecteur et, au centre, un synthé, un rétro-projecteur avec écran, des plantes vertes, un aquarium et des oranges en vrac.  Dora Pardali et Hélène Sidirokastriti incarnent, avec un jeu plein d’énergie et de fantaisie, cette héroïne aux deux facettes et elles se complètent bien. A la fin, nous avons envie de danser et sortons réjouis  par ce happening… proche de l’esprit moderniste de Virginia Woolf ! 

 Nektarios-Georgios Konstantinidis 

 Salle d’art Parenthèse, 3 rue Dionissiou Efessou, Athènes, T. : 00306943648438

Δευτέρα 16 Μαΐου 2022

Aphrodite de Pavlos Matessis, adaptation et mise en scène de Katerina Klitsioti et Sophie Koroni


Cet auteur, né en 1933 et disparu en 2013, a écrit des pièces, des romans et fait plusieurs traductions remarquables. Il se disait homme de théâtre mais prétendait qu’en prose romanesque, il n’était qu’ «un passager clandestin». Dans cette nouvelle (1986), il traite de la relation, implacable et possessive avec ses deux fils, d’une mère quittée par son mari et devenue l’amante de son patron. Aphrodite a été, et cela dès sa naissance, toujours opprimée, humiliée et sous les ordres et les insultes d’un homme.

Une écriture proche de celle d’un thriller et d’un roman oscillant entre deux langages: l’un poétique, et l’autre cru et cynique, pour dire le manque d’amour et la possession enragée de liens familiaux. Les metteuses en scène alternent narration et dialogues d’une intensité remarquable et le rituel qui sous-tend cette pièce renforce encore le suspense, sur fond de violence incestueuse mais sans choquer le public.

L’excellent Giorgos Doussis joue un des deux fils et l’amant-patron, avec une expression virile. Vassilis Hatzidimitrakis montre adroitement les nuances des sentiments qu’éprouve l’autre fils, assez traumatisé. Et Sophie Koroni incarne Aphrodite avec verve et fébrilité. Ce spectacle, miroir de notre société, pose la redoutable question de la responsabilité des nombreux féminicides actuels.

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Théâtre Bios, 84 rue Peiraiws, Athènes, T. : 0030 210 3425335.

Σάββατο 14 Μαΐου 2022

L’Aile, performance d’Hélène Mavridou


Dans une clinique d’accouchement, trois portes et une salle vitrée. Va et vient continus des médecins, aides-soignantes, infirmières dans la pénombre. Mais peu de paroles. Une naissance est le point de départ du spectacle. Un bébé est arrivé et nous allons suivre suivre ses parents jusqu’ à la sortie de la clinique.  Il y a ici un mélange de cris de joie et chuchotements mais aussi de soupirs de douleur. Vacarme d’enthousiasme autour d’un nouveau né mais aussi des signaux d’alarme : un bébé est en train de mourir… L’accouchement est représenté comme une bataille, avec les petits moments d’une journée ordinaire d’une clinique où alternent moments de bonheur et de malheur.

Une sage-femme avec masque qui se distingue des autres personnages, se vante d’une voix stridente d’avoir fait naître plus de mille deux cents enfants. Ses courts monologues pleins de douceur mélancolique qui reviennent par bribes tout au long du spectacle, soulignent l’importance de son métier pour elle. C’est toute sa vie : une vocation, une vraie mission et chaque jour, elle suit de près la lutte acharnée des nouvelles mères qui accouchent et les encourage de ses conseils et son expérience. Et quand les mères partent de la clinique, elle reste seule et attend les suivantes : la vie continue… L’aile est son royaume.

Hélène Mavridou parle de la représentation du corps naissant, et du corps accouchant, à travers des images très fortes au symbolisme clair et elle trace bien la ligne de démarcation entre l’éphémère de la vie et la peur de la mort. Il y a des instants très forts avec un fauteuil roulant, un aquarium sur un brancard ou la petite robe dont accouche une femme, seul signe marquant que le bébé est féminin.

Ce spectacle d’une poésie incontournable explore divers aspects de la maternité à travers des scènes qui font rire et d’autres, violentes, avec sang, sueur et larmes. Ces instantanés d’accouchements quotidiens, familiers mais aussi étrangers à la fois où le rituel, la mémoire, les souvenirs et les témoignages ont une place primordiale. Avec des clins d’œil à Anton Tchekhov et Samuel Beckett…Un bel hommage à la maternité et une réflexion pleine d’émotion sur la naissance. A ne pas manquer. Joël Pommerat serait ravi de cette efficace écriture, dite de plateau! 

Nektarios-Georgios Konstantinidis 

Théâtre Choros, 6-8 rue Praviou, Athènes, T. :0030 2103426736 

https://www.youtube.com/watch?v=lOefqubpS1I 

Παρασκευή 13 Μαΐου 2022

10: La Liberté a besoin d’un arrosage quotidien, mon amour,chorégraphie d’Artémis Lambiri

 


«Sans liberté, nos vies sont une petite mort.» Une phrase qui a inspiré cette artiste pour créer  un spectacle collectif avec la MAN Dance Company. Avec pour thème, la notion existentielle du mot liberté dans ce dur post-covid en Grèce comme ailleurs.

Une œuvre sans paroles mais posant nombre de questions: que signifie exactement liberté et quelles en sont les limites? Quelles sont nos peurs et nos inquiétudes, face au regard critique de l’autre,forcément différent de nous? Qui gagne et qui perd dans ces relations complexes ? La liberté est un droit mais, dans la routine de la vie quotidienne, elle change tout le temps de formes et de couleurs.

Ce spectacle traite de la valeur des choses: l’individu souffre aujourd’hui souvent de comportements humiliants, comme le mépris de l’autre qui peut être un associé, un collaborateur, voire un partenaire…Alors qu’il fait tous ses efforts pour avoir une « situation » qui en vaille la peine.

Dix danseurs sur une scène vide «racontent» grâce à une remarquable gestuelle, dix histoires apparemment ordinaires, mais tout à fait uniques. Celles de gens qui cohabitent et qui cherchent à créer un espace commun. Les corps des danseurs sont expressifs et énonciateurs de messages vibrants. A partir d’improvisations dont la signification est claire, ce spectacle arrive à nous toucher profondément… 

 Nektarios-Georgios Konstantinidis

Jusqu’au 17 mai, Thission-Un Théâtre pour les arts, 7 rue Tournavitou, Athènes.T. : 00302103255444.